Aller au contenu

Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/290

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bien le chef suprême de tous ces bons garçons, quelle que soit leur apparente position sociale.

— Très bien, voilà qui est répondu carrément.

— Je vous l’ai promis.

— C’est juste ; à combien leur nombre s’élève-t-il ?

— À Paris, ou pour toute la France ?

— Non, à Paris seulement.

— Est-ce un chiffre exact que vous me demandez ?

— Oui, autant que possible.

— Ils sont environ quarante-cinq mille.

— Tant que cela ! s’écria M. Romieux avec une véritable surprise.

— Ils sont beaucoup plus nombreux en réalité, mais je n’entends parler ici que de ceux dont les antécédents connus ou soupçonnés mettent dans la nécessité de déclarer franchement la guerre à la société.

— Hum ! sur combien de ces hommes pouvez-vous compter ?

— C’est selon ; de quoi s’agit-il ?

— Je vous le dirai.

— J’ai besoin de le savoir d’abord, pour vous répondre positivement.

— Pourquoi cela ?

— Je m’explique, écoutez-moi bien.

Et retirant son cigare de sa bouche, il s’assit sur le canapé.

— Je ne perds pas un mot, dit M. Romîeux.

— Il existe à Paris, dit le Loupeur, quarante-cinq mille individus au minimum, et cela dans toutes les classes de la société, depuis les plus hautes jusqu’aux plus abjectes, qui se réveillent le matin sans un sou vaillant, qui n’exercent aucune profession reconnue, qui ne veulent pas travailler, car ils ont le travail, même le plus doux et le plus facile, en exécration, et qui cependant prétendent vivre, et bien vivre, et se donner toutes les jouissances que procure la fortune, en prélevant au détriment d’autrui ce qui leur manque pour couler des jours semés de soie et d’or à foison, sans se donner