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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/31

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que moi ; et d’ailleurs mieux vaut, je crois, que personne ne voie cet homme.

— De quel homme parlez-vous, senor ?

— De celui que vous allez voir dans un instant, et qui attend probablement, embusqué derrière cette muraille.

— Allons, dit le jeune homme.

Ils se rapprochèrent de la porte.

— Restez un peu de côté, afin qu’il ne vous voie pas tout de suite ; cela pourrait l’effaroucher.

— Que de précautions ! dit le chasseur tout en faisant ce que le mayordomo lui demandait.

— On ne saurait trop en prendre, dit sentencieusement ño Ignacio.

— C’est juste. Je vous donne carte blanche. Agissez donc à votre guise ; je ne me montrerai que sur votre ordre.

— À la bonne heure !

Le mayordomo entr’ouvrit alors la porte, avança la tête au dehors et examina pendant quelques instants les environs.

Tout était calme, silencieux et solitaire, on était à cette heure mystérieuse où le ciel commence à se rayer de larges bandes blanchâtres ; où les étoiles s’éteignent les unes après les autres dans l’éther ; où l’atmosphère chargée des brumes grisâtres qui s’élèvent de terre comme une fumée légère, estompe l’horizon et ne permet de distinguer les accidents du paysage que comme à travers un prisme.

Ce n’est plus la nuit, ce n’est pas encore le jour.

C’est l’aube.

La nature semble tressaillir tout entière à l’approche du réveil.

De vagues et étranges frémissements passent à tram vers les branches des arbres.

Des senteurs fraîches et acres s’exhalent du soi et dilatent délicieusement les poumons.

On se sent revivre.

L’air s’imprègne de ces émanations.