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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/337

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à quelques pas de là et qui semblaient l’examiner avec défiance.

Un peu plus loin, un cavalier venait d’apparaître au coude d’une allée et s’était arrêté, lui aussi, les regards curieusement fixés sur l’étranger.

Alors, par un puissant effort de volonté, cet homme maîtrisa instantanément la colère qui grondait au fond de son cœur ; il réussit à reprendre son calme apparent, bien que son visage, sur lequel sa balafre tranchait en rouge, restait d’une pâleur cadavéreuse. I

Il laissa retomber lentement sa main sur le pommeau de sa selle et, s’approchant du jeune comte qui était demeuré immobile et froid à la même place, il se pencha vers lui, et d’une voix sombre, dans laquelle on sentait vibrer une colère sourde à peine contenue :

— Nous nous reverrons, monsieur, lui dit-il.

— Soit, répondit railleusement le jeune homme, seulement, je vous avertis, monsieur, qu’à cette prochaine rencontre, j’aurai des revolvers sur moi.

— À bientôt ! dit l’inconnu d’une voix effrayante.

— Comme il vous plaira ! répondit le jeune homme toujours railleur.

L’inconnu mit les éperons aux flancs de son cheval ; l’animal fit un bond prodigieux en hennissant de douleur et partit avec la rapidité d’un simoun africain.

Au moment où, rapide comme la foudre, il passait devant le cavalier dont nous avons parlé plus haut, celui-ci lui cria d’une voix goguenarde, dont l’expression est impossible à rendre :

— Ohé, Mayor ! prenez garde de vous rompre les os !

L’inconnu tourna machinalement la tête vers l’auteur de cette interprétation étrange.

— C’est lui ! j’en étais sûr, murmura le jeune homme qui avait entendu l’apostrophe singulière du cavalier ; et en suivant du regard la course affolée de l’inconnu, le diable est déchaîné, ajouta-t-il ; il faut aviser !

Et il fit signe à Vanda de venir le rejoindre.