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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/214

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Elles étaient obligées de marcher l’une derrière l’autre, et allaient ainsi à deux ou trois pas de distance.

Mademoiselle de Valenfleurs était en avant.

Tout à coup, miss Lucy Gordon entendit sa compagne pousser un cri de terreur aussitôt étouffé.

La jeune Américaine, effrayée par ce cri, qu’elle ne savait à quoi attribuer, et naturellement courageuse, voulut s’élancer au secours de mademoiselle de Valenfleurs, qu’elle supposait être en danger.

Elle se sentit retenue ; elle essaya de se débattre et d’appeler à l’aide.

Un châle fut jeté sur sa tête pour étouffer ses cris, en même temps que ses membres étaient étroitement garrottés au moyen de mouchoirs et de foulards. En une seconde, elle fut ainsi réduite à la plus complète impuissance.

Elle sentit que deux hommes l’enlevaient avec précaution dans leurs bras et l’emportaient rapidement.

Bientôt elle se sentit assise dans une voiture.

— C’est à merveille ! dit une voix goguenarde : chacun de nous a sa tourterelle ; bonne chance, ami Loupeur. Surtout n’oubliez pas demain.

Puis la portière fut fermée brusquement, et la même voix ajouta, toujours railleuse :

— Fouette, cocher ! En route pour Cythère !

La voiture partit aussitôt au grand trot.

Il sembla à la jeune Américaine, qui avait conservé toute sa lucidité d’esprit, qu’une seconde voiture partait en même temps que celle dans laquelle elle était, mais dans une direction différente, car le bruit du pas des chevaux et le roulement des roues ne tardèrent pas à cesser.

Miss Lucy Gordon n’était pas seule dans la voiture ; quelqu’un était assis près d’elle.

Elle entendait la respiration haletante de cette personne, immobile et silencieuse à son côté.

C’était probablement la personne à laquelle on avait donné le nom de Loupeur.