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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/226

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doutes, tu veux une preuve de mon infamie ?… Eh bien, soit ! cette preuve, je vais te la donner…

— Monsieur ! monsieur ! s’écria-t-elle en reculant avec effroi devant le regard cynique du bandit, que prétendez-vous donc ?

— Ce que je prétends ? cria-t-il, avec un rire de démon, je pretends que tu sois à moi, ici même, à l’instant ! ne pouvant être ma femme, tu seras ma maîtresse…

— Oh ! vous êtes un lâche ! s’écria-t-elle avec un accent d’écrasant mépris et de dégoût.

Le misérable bondit à cette insulte, que la jeune fille exaspérée lui avait craché au visage.

Il tressaillit ; un frisson nerveux secoua tout son corps, ses traits se convulsèrent ; il devint hideux.

L’homme du monde disparut subitement ; il n’y eut plus que le Loupeur, le bandit, chef de l’armée roulante.

— Appelle-moi lâche, misérable fille ! que m’importe ! tu seras à moi, je le veux ! Rien ne pourra te sauver, s’écria-t-il d’une voix rauque ; n’essaie donc pas une lutte impossible contre moi. Je le veux, te dis-je !

Il était au paroxysme de la rage ; il grinçait des dents ; il était horrible.

C’était enfin la brute immonde dans toute son effroyable hideur.

La jeune fille se sentit perdue, seule avec ce monstre, envahi et dominé par une dégoûtante ivresse, et chez lequel tout sentiment humain était mort, pour ne laisser subsister qu’une volonté irraisonnée et infâme.

— Ayez pitié de moi, s’écria-t-elle avec douleur, et fondant en larmes.

— Non, dit-il avec un ricanement sinistre, tu es trop belle ! je t’aime ; tu seras à moi, je te tiens ; je te veux ! tes pleurs ne m’attendriront pas !

— Au nom de ma mère, pitié !

— Non, te dis-je ; je te veux !

Et il fit un pas et essaya de la saisir.

La jeune fille recula.

— Tuez-moi ! tuez-moi ! s’écria-t-elle avec désespoir,