Aller au contenu

Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/365

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Patience, Loupeur, lui dit le policier en riant, nous nous occupons de vous.

— Tiens, vous me connaissez, vous ? Elle est bonne, celle-là, par exemple !

Sur un signe du policier, Bernard consentit à faire lâcher prise au chien.

— Ici, Dardar, mon vieux ! lui cria-t-il ; viens, tu es un beau et brave chien !

Dardar se trouva d’un bond près de son ami, jappant doucement, agitant la queue et faisant le beau, tout fier des caresses que lui prodiguait Bernard.

Le Loupeur se releva vivement.

— Bravo ! s’écria-t-il en riant et faisant jouer toutes ses articulations ; rien de cassé ; quelques coups de dents par-ci par-là, mais rien de grave ; j’en reviendrai. C’est égal, ce toutou est magnifique, je ne dirai pas le contraire. D’ailleurs j’adore les bêtes ; mais je ne me soucie pas d’un nouveau tête-à-tête avec lui ; quel gaillard ! Comme il a arrangé ce pauvre père Romieux ! En voilà un qui n’en mène pas large ! Il le dévorait tout vivant. J’ai tiré sur lui un coup de revolver ; je l’ai manqué, mais il ne m’a pas manqué, lui ! Quelle poigne, mes enfants ! Oh là là ! je passe la main ; je demande un autre partenaire ! Merci, n’en faut plus !

Les deux hommes avaient écouté en souriant la singulière élucubration du bandit. Lorsqu’il s’arrêta, faute d’haleine sans doute, le policier lui dit avec une exquise politesse, tout en se bourrant le nez de tabac :

— Si vous m’aviez fait l’honneur de me regarder un peu plus attentivement, cher monsieur, vous vous seriez évité, j’en suis certain, ce long boniment de carrefour ; il ne nous trompe pas. Nous vous connaissons très bien, vous ne nous donnerez pas le change ; redevenez donc, je vous prie, ce que vous êtes réellement, c’est-à-dire un homme comme il faut, ce qui nous fera grand plaisir.

— Ah ! ah ! dit le Loupeur en l’examinant à son tour et fronçant le sourcil, le Giverneur ! Excusez-moi, mon-