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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/57

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Les bandits quittèrent alors la remise et se dirigèrent à pas de loups vers la maison.

Pendant que sous la remise avait lieu ce sinistre conciliabule, disons ce qui se passait dans la maison.

Sebastian et sa femme, — car la soi-disant sorcière, dont le véritable nom était Michela Ezaguirre, était réellement sa femme, il l’avait épousée à Liverpool, un mois après l’avoir retrouvée en Angleterre, avant de se rendre en France, — Sebastian et sa femme, disons-nous, achevaient un souper très plantureux et causaient à table en humant leur café à petits coups.

Sebastian fumait dans une magnifique pipe de Cummer, Michela semblait triste, nerveuse, inquiète : elle était fort belle ainsi, en costume de chambre et éclairée par la lueur éclatante d’un lustre ; son teint naturellement pâle prenait à la lumière des reflets dorés.

Sebastian riait et essayait de la rassurer, mais tous ses efforts étaient vains.

— J’ai peur dans cette maison isolée et loin de tout secours, disait-elle d’une voix plaintive.

— Mais, de quoi as-tu peur, au nom du diable ! lui dit Sebastian avec un mouvement d’impatience qu’il ne fut pas maître de dissimuler ; ne suis-je pas près de toi ?

— C’est vrai, mon ami, mais je ne puis te répéter que ceci : j’ai peur, sans savoir pourquoi. Peut-être est-ce un pressentiment. D’ailleurs, tu le sais, la peur ne se raisonne pas ; on la subit. Il me semble qu’un malheur nous menace.

— Tu es folle ! quel malheur peut nous menacer ? Je ne vois personne, ni toi non plus, nous n’avons aucun ami qui nous puisse trahir ; personne au monde ne me connaît dans cette maison perdue.

— Tout ce que tu me diras n’y fera rien, mon ami, c’est plus fort que moi ; cette maison a une réputation sinistre : tous ceux qui avant nous l’ont habitée y sont morts assassinés. Ah ! pourquoi n’as-tu pas voulu me croire quand je te suppliais de ne pas revenir en France ? et plus tard,