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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/6

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naux, vous verrez dix-neuf fois sur vingt les sergents de ville ou les gardiens de la paix, nommez-les comme il vous plaira, arriver lorsqu’il n’y a plus qu’un blessé ou un cadavre à relever sur la voie publique.

Exemple :

J’habite un quartier excentrique ; ma rue est surveillée le jour et la nuit par des agents qui se succèdent continuellement par deux et par trois, et se croisent mathématiquement à des points désignés.

S’il se produit le plus léger incident, c’est vainement que l’on cherche ces agents : ils ont disparu tout à coup, comme engloutis par une trappe anglaise.

Il est impossible d’en trouver un.

Mais aussitôt le calme rétabli, la rixe terminée, ou le voleur échappé, alors que l’on n’a plus besoin d’eux, ils reparaissent sans qu’on sache d’où ils sortent, calmes, impassibles, causant de leurs petites affaires, et recommençant leur promenade sur les trottoirs où ils gênent la circulation.

Ceci est à la lettre, je ne critique point, je constate un fait malheureusement trop prouvé.

À quoi tient cet état de choses ?

Ah, dame ! à bien des raisons : ces agents sont de braves et honnêtes soldats ; ils voudraient bien faire mieux, et cela leur serait très facile, si on les laissait libres ; mais la consigne ?

Et puis leur service est si admirablement réglementé.

C’est ainsi en France.

L’administration a la rage de réglementer à outrance ; elle pousse même cette manie déplorable jusqu’à réglementer les lois elles-mêmes, et cela de telle sorte, que nous ne sommes plus gouvernés par les lois, mais par des règlements presque toujours idiots.

Si bien, que lorsque vous êtes assez naïf pour invoquer une loi, un plumitif quelconque vous répond avec cet aplomb que l’on sait :

— La loi, c’est très bien, mais voyez d’abord les règlements qui régissent la matière.