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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/78

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même, à huit heures. » Et retirant son porte-monnaie de sa poche (il était plein d’or) il prit trois louis et me les mit dans la main, en me disant : « Voilà pour que tu n’oublies pas notre rendez-vous ; tu auras autant tous les jours, si je suis content de toi ; mais, marche droit, je te le conseille ; tu me connais maintenant : au moindre soupçon, ton affaire sera réglée, et maintenant file et plus vite que ça… » Je ne me le fis pas répéter, et je m’esbignai en courant comme un dératé.

— Et le lendemain, tu allas au rendez-vous ?

— J’te crois, que j’y allai.

— Et il te remit trois louis ?

— Très bien, et comme ça tous les jours.

— Sapristi ! tu as de la chance, toi.

— Je suis né coiffé, à ce que m’a dit ma bonne femme de mère.

— Et qu’est-ce que tu fais pour gagner tant d’argent ?

— Ah ! dame ! si on te le demande, tu répondras que tu ne le sais pas ; j’ai juré de garder le secret.

— Alors, c’est autre chose, n’en parlons plus. Est-ce que ça t’empêchera de me donner un coup de main ? J’ai besoin de toi, et j’avais compté sur toi.

— C’est selon, ça dépendra de toi.

— Comment cela ?

— Tu vas voir : j’suis occupé à peu près pendant trois ou quatre heures ; c’est une « filature » ; j’suis toujours libre à quatre heures. Mon bourgeois, que j’ai vu à cinq heures, m’a donné rendez-vous pour demain, à la même heure, à cinq heures et demie. Je serai libre comme l’air pendant toute la nuit, ça va-t’y comme çà ?

— Très bien.

— Alors je suis ton homme ; c’est-y difficile ?

— Pas trop, il s’agit de décrocher un individu d’une embuscade, et de se la courir sans même retourner ses poches.

— Le danger n’est pas grand, alors ?

— Il n’y en a pas l’ombre.

— Et l’on donne ?