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Page:Aimard - Les invisibles de Paris, 1893.djvu/231

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dernière extrémité, et dans le but d’empêcher de nouveaux crimes, je remets ces dernières volontés entre les mains du capitaine Noël, que j’institue mon exécuteur testamentaire.

« Le jour où il le jugera convenable, il pourra les produire.

« Par suite de ces dernières volontés, doña Hermosa de Casa-Real est déshéritée de tous mes biens, meubles et immeubles, s’il lui prend fantaisie de se remarier.

« Je désire être sa dernière victime.

« Cela est mon testament.

« En foi de quoi je signe cette dénonciation entièrement écrite de ma main, pour valoir ce que de droit.

« Et j’y appose le sceau de mes armes.

« Fait à Casa-Real (île de Cuba), dans la nuit du 2 au 3 novembre 184..

« (Signé) Fernando-Iriarte de Carvajal y Gusman, comte de Tordesillas y Casa-Real. »


La lecture achevée, le comte demanda à Noël :

— Acceptez-vous mon mandat ?

— Oui, comte.

— J’ai foi en vous, capitaine. Allez… maintenant… partez. Un cheval sellé vous attend.

— Vous laisser ainsi…

— Avec elle… n’est-ce pas ? Cela vous fait trembler pour moi… fit le comte en riant d’un rire qui n’avait plus rien de ce monde… Eh bien ! partez rassuré. Elle ne peut plus rien sur moi. Adieu.

Il tomba.

Noël se précipita vers lui.

Son cœur ne battait plus.

La créole était veuve.

Noël s’élança hors de cette demeure maudite, serrant dans sa main fiévreuse le testament du comte de Casa-Real.

Ce testament devait lui coûter cher un jour !

La comtesse resta seule, en face du cadavre de l’homme qu’elle avait assassiné !


VI

LES PASSAGERS

Quinze jours s’étaient écoulés depuis la mort du comte de Casa-Real.

Cette mort n’avait surpris aucun de ses amis.

On lui fit de magnifiques obsèques.

La comtesse, sa veuve, prit le deuil. Le noir lui allait très bien.