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Page:Aimard - Les invisibles de Paris, 1893.djvu/930

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avait averti sir Harry Mortimer et le colonel Martial Renaud de ce qui s’était passé entre lui et M. de Warrens.

La résolution que le capitaine avait prise de se rendre, coûte que coûte, seul à ce rendez-vous dans Sydney-Coves, c’est-à-dire dans le quartier le plus dangereux de San-Francisco, parut aux amis du comte une folie et surtout une imprudence.

Les deux hommes frémirent de terreur à cette révélation ; car ils avaient, du premier coup, pressenti le guet-apens tendu à leur chef bien-aimé et, les périls terribles qui le menaçaient et auxquels peut-être son courage ne parviendrait pas à le faire échapper.

Cependant il n’y avait pas une seconde à perdre pour essayer de le sauver.

Tandis que le colonel Martial Renaud, aidé par Mouchette, réunissait les Compagnons de la Lune, sir Harry Mortimer, lui, se rendait en toute hâte au siège du comité de vigilance, dont un tiers des membres, ainsi que cela avait été arrêté précédemment par l’assemblée, restait jour et nuit en permanence.

Sir Harry Mortimer expliqua en peu de mots aux membres du comité, tout en modifiant légèrement la vérité, comment son associé Master-Key avait été, une heure auparavant, attiré par un faux rendez-vous d’affaires dans un guet-apens, tendu dans Sydney-Coves, pour y être dépouillé et étranglé par des assassins, selon toute probabilité.

Le comité, en apprenant que les bandits avaient osé pousser l’audace jusqu’à s’attaquer à un de leurs membres les plus considérés, avait bondi d’indignation.

Il résolut tout d’une voix d’en finir une fois pour toutes avec ces misérables brigands, en les attaquant et les enfumant, s’il le fallait, dans leur antre immonde.

Les ordres avaient été immédiatement expédiés à tous les affiliés du comité de vigilance, et moins d’une demi-heure plus tard cinq mille hommes au moins, tous bien armés, auxquels étaient venus avec empressement se joindre tout d’abord les Compagnons de la Lune, étaient réunis eh bon ordre et pleins d’ardeur sous les fenêtres de la maison où se tenait le comité.

De là, quelques minutes plus tard, après avoir formé leurs rangs, ils se mettaient en marche, les membres du comité de vigilance à leur tête, pour aller donner l’assaut aux bandits et les forcer dans leur repaire.

Ces soldats volontaires, dévoués de l’ordre et de la tranquillité publique, se recrutaient chemin faisant et pour ainsi dire presque à chaque pas, parmi tous les honnêtes gens devant les maisons desquels ils passaient ; de sorte qu’ils formaient déjà une masse imposante et considérable lorsqu’ils arrivèrent enfin à l’entrée du quartier de Sydney-Coves.

Alors on nomma des chefs secondaires, puis on se divisa en trois forts détachements, et, à un signal donné, le quartier maudit, complètement entouré, fut vigoureusement assailli par trois côtés à la fois.

Le colonel Martial Renaud et ses compagnons, dont la plus grande partie étaient des affiliés des Invisibles, poussèrent droit devant eux, et se dirigèrent en renversant tous les obstacles qu’on essayait en vain de leur opposer, vers