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Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/13

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INTRODUCTION

André Maurois au contraire pose le problème le plus général du commandement : il cherche l’une des lois organiques de la vie des groupes, en même temps que la loi morale des rapports des hommes entre eux. Des conditions élémentaires de la cohésion d’une escouade il passe à certains moments à la discussion du libre arbitre. Dans l’unité d’esprit avec laquelle il aborde ce problème se trouve la formation philosophique, et l’influence d’Alain. Tout le monde sait déjà, au reste, que le philosophe qui, après sa classe, traverse le Luxembourg en causant quelquefois avec un ami choisi ne peut guère être qu’Alain ; on croit même reconnaître, dans les Dialogues sur le Commandement, les brusques familiarités, les sentences serrées suivies de plaisanteries, parfois la mimique expressive et brève, les traits de l’homme que ses livres sont loin de révéler tout entier. Si le livre de Maurois n’était si savamment, si implacablement conduit vers le but qu’il s’est d’avance proposé, il donnerait peut-être une idée de cette fougue assouplie, de cette éloquence méfiante de soi, de cette puissance soutenue de faire vivre les idées d’autrui, et enfin de ces improvisations inimitables que les élèves d’Alain n’oublient plus. Mais le philosophe des Dialogues sur le Commandement se résigne lui-même à n’être que l’« avocat du Diable » et Maurois reconnaît ainsi que l’homme et sa doctrine ne lui sont ici que des moyens, et qu’il les limite à quelques négations simples. Au risque de nous donner le même tort à son égard, dégageons sa thèse essentielle des discussions et surtout des exemples. Car en effet le jeu naturel des souvenirs, les habitudes personnelles de l’histoire, tout le Plutarque officiel

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