Aller au contenu

Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/14

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.






INTRODUCTION

ou anonyme arme Maurois de merveilleux, d’irrésistibles exemples. Quelle est l’histoire un peu ancienne ou mal connue, l’anecdote brillante, le livre de Mémoires qui ne nous montre le triomphe de l’intelligence, de l’énergie, du héros ? Mais voyons ses idées, qui restent bien assez fortes une fois dépouillées de ces prestiges :

L’art d’être un chef peut paraître insignifiant ou ridicule si l’on s’en tient aux formules vides[1]  ; mais tout est dans l’exécution. Le chef se distingue du commun par l’art de peser les possibles et de combiner les moyens. Ni le hasard, ni même le seul talent spécial, ne suffisent à expliquer le succès régulier et continu de certains chefs. L’énergie de caractère, nécessaire au chef militaire, est d’ailleurs aussi chez le chef politique la meilleure garantie de la paix. La qualité plus proprement intellectuelle du chef sera une facilité à discuter avant les décisions, l’impartialité à ses propres idées. Le vrai chef sait d’ailleurs être obéi autrement que par la crainte, et ses subordonnés travaillent par amour pour lui.

La préparation de toute action importante comporte bien des éléments mesurables ; mais raisonner d’après ces seuls éléments, c’est se confiner dans la théorie pure. Les éléments incommensurables sont dans la pratique (et ici la thèse de Maurois s’appuie plus particulièrement sur des exemples militaires) ceux qui prédominent toujours. Nous donnerons

⸻ 10 ⸻
  1. Dans son Guide de l’homme d’action, p. 112, le général Rampont écrit : « L’offensive peut s’exécuter sous des modalités diverses, mais elle n’obéit qu’à un principe : avancer ! Elle prend ainsi l’attitude la plus simple, » Eh bien ! cette formule n’a peut-être de la naïveté que l’apparence.