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Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/143

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LE CITOYEN CONTRE LES POUVOIRS

entretiennent, renouvellent l’inégalité de toutes les manières. Aussi n’importe quel privilégié sent bien qu’il faudra quelque massacre de nation à nation pour restaurer un état des choses en soi impossible, et qui, dans le moindre retour de paix, s’en va toujours croulant. Chacun a pu observer ce paradoxe que l’idée même de la paix perpétuelle irrite. Mais qui irrite-t-elle ? Observez ceux et celles qui déclament contre l’égalité, contre la coalition ouvrière, contre les prétentions des employés et des domestiques. Observez aussi ceux et celles qui déclament contre l’Allemand, bientôt contre l’Anglais, toujours pour la guerre et toujours contre la paix. Ce sont les mêmes ; et le ton est le même.

Notre politique intérieure offre un spectacle inattendu.L’EXÉCUTIF EST
PRUDENT PAR FORCE.

Notre politique intérieure offre un spectacle inattendu. Cette Chambre[1] résume en ses puériles idées, comme en ses passions déréglées, un régime de despotisme, de basse police, de délation, de proscription, de prodigalité, couvrant comme d’un manteau une misère héroïque. Comme un roi qui a coutume de se mentir à lui-même. Mieux encore qu’un roi ; ce roi a beaucoup de têtes : les flatteries et les opinions agréables sont réellement échangées ; chacun y est roi et courtisan, Convulsion, caprice, aveuglement. Mais les mœurs et l’esprit public ne se reconnaissent nullement en cette peinture décorative, brossée pour de courtes réjouissances et qui étale vainement ses couleurs brutales. Cette

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  1. De 1919