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Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/149

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LE CITOYEN CONTRE LES POUVOIRS

paveurs et des plombiers. Ils admettent moins aisément que l’homme de la rue soit toujours gêné et limité, et les pouvoirs libres. « Car, disent-ils, j’entends bien que la sécurité et la puissance publiques sont quelque chose ; mais il y a d’autres biens, comme vivre, produire, échanger ; ces biens ne seraient rien sans la sécurité et peut-être même sans la puissance ; mais en revanche, la sécurité et la puissance sont des mots, hors de la commune et humble prospérité. Donc faites votre métier de gouvernant, et je veux bien me gêner pour vous le rendre facile ; mais que les gouvernants s’incommodent aussi pour moi. Car je sais bien ce que deviendront nos rues si le paveur est seul juge. Et je connais aussi par expérience quels sont les travaux du gouvernement dès qu’on le laisse faire. Ce sont des armées, ce sont de ruineuses querelles et de prodigieux éventrements. Disant toujours qu’on ne peut faire autrement. Et de bonne foi. Le paveur barrera toute la rue, et entassera encore ses pavés dans votre cour, si on veut l’en croire. »

« J’irai à la conférence remplir mes devoirs deL’OPINION VAINCRA
LES PARTIS.

« J’irai à la conférence remplir mes devoirs de bon Européen. » C’est M. Ribot qui parle, et devant notre Sénat. Cette manière de dire est digne de remarque[1]. L’homme est profondément cultivé et éloigné de tout fanatisme, autant qu’on peut savoir ; mais il a toujours fait voir de la prudence et même de la crainte à l’égard du sentiment public ; ce pilote

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  1. Écrit en 1920.