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Page:Alain - Le Citoyen contre les pouvoirs, 1926.djvu/158

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LE CITOYEN CONTRE LES POUVOIRS

dernier siècle, les uns sont aujourd’hui communistes, d’autres sont nationalistes. Et le chef lui-même, qui vient de mourir, avait depuis longtemps quitté son propre parti. Pour moi j’y reste attaché, assuré que tous les hommes libres y reviendront. Mais pour les jeunes, qui ne savent pas de quoi je parle, quelques explications sont nécessaires.

Le Combisme n’est autre chose que l’action permanente de l’électeur sur l’élu. Et voici comment l’on procède. Tous les citoyens, de quelque parti qu’ils soient, et qui ont fait serment à eux-mêmes de contrarier le jeu des Grands Politiques, envoient à la Chambre un homme plus ou moins modéré, plus ou moins tenu par ses relations et par ses intérêts ; les nuances n’importent pas ici autant qu’on pourrait croire ; en règle générale on peut poser que n’importe quel député, dès qu’il est laissé à lui-même, fait le jeu des Grands Politiques. Mais il ne faut que de vigilants comités, et quelques hommes sûrs qui veuillent donner un peu de leur temps. Ces hommes viennent en mission près du député, et lui parlent énergiquement toutes les fois que cela est nécessaire, soit pour signaler les puissances locales, toujours portées à favoriser les protégés des grands Politiques, soit pour préparer la chute des Grands Politiques eux-mêmes, dès qu’ils deviennent arrogants et secrets. Par ces continuelles manœuvres, les hommes dévoués dont je parle s’exposent à de furieuses attaques, qui peuvent aller jusqu’aux coups de poing. Mais on en trouve qui acceptent ces risques et on en trouve d’autres, dans chaque ville, qui, sans l’espoir d’aucune récompense et pour la beauté du jeu, leur font une garde du corps.

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