Aller au contenu

Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mouvante. Mais laissant cette importante idée, d’après laquelle tant de déformations connues, et par exemple celle du bâton qui paraît brisé dans l’eau, sont vraies sans difficulté, je veux chercher où est ici l’imagination, ici, c’est-à-dire dans cette vitre qui déforme une chose et l’autre selon mon mouvement, et je trouve l’imagination dans ce mouvement même. Je comprends alors que je ne vois pas seulement toutes choses comme à travers une autre vitre qui serait moi-même, mais que, de plus, les divers mouvements que je fais, soit avec intention, si j’agis, soit par émotion, si j’ai peur, ou seulement par les transports continuels de respiration et de circulation qui assurent la vie, ne cessent jamais de déformer ce que je vois, ce que j’entends, ce que je goûte, ce que je flaire, ce que je touche. Je voudrais croire que, cette fois-ci, je tiens une erreur à proprement parler ; et au fond c’est par des mouvements de lui-même tout à fait intempérants, que le fou arrive à ne