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Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/66

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indépendant, mais familier, c’est la mère, c’est le père, c’est le frère ; c’est la nourrice, la bonne, la cuisinière et le jardinier. Tout dépend d’eux, les biens et les spectacles ; et chacun d’eux a sa province et ses pouvoirs ; mais chacun d’eux aussi a ses refus. D’où l’on voit que le monde des enchanteurs et des sorcières n’est pas d’abord imaginaire. Les apparitions des choses sont subordonnées à l’apparition des personnes. Et les opérations de cette étrange physique sont des conjurations à proprement parler. La grande affaire de Faust est d’appeler le diable par son nom ; cette méthode ne nous étonne pas autant que nous voudrions. Mais plutôt nous nous souvenons que les choses furent ainsi dans l’ancien temps, quand le nom faisait venir l’homme puissant qui nous ouvrait la porte ou la barrière. Et quand je dis que nous nous souvenons, je dis trop ; car se souvenir c’est se représenter des choses et penser qu’elles ne sont plus et ne seront plus ; au