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Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/70

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mêlé à nos pouvoirs physiques. Nous parlons aux choses. Vainement on considérera le langage de tous les côtés ; on n’arrivera pas à comprendre assez que le langage est toujours notre premier essai de connaître ou de changer quoi que ce soit. Et la condition inévitable de nommer avant de connaître expliquerait tous les détours du savoir. Nous parlons et racontons, aux autres et à nous-mêmes. Notre vie pensante est premièrement un discours, qui traverse même le sommeil. Mais ce qui est surtout à remarquer, c’est une avance du discours sur la pensée ; ce qui serait peu croyable, si l’on ne comprenait pas que l’enfant parle naturellement avant de savoir ce qu’il dit. Analysez le dialogue entre la mère et l’enfant, vous verrez que l’enfant renvoie les mots comme des balles, et admire qu’il s’entende lui-même comme il entend l’autre ; cette sorte d’écho est le premier sens du langage, et le sera toujours. Cette résonance humaine se