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Page:Alain - Lettres à Henri Mondor, 1924.djvu/66

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LETTRES D’ALAIN

bien plus funeste. » Toutefois ce n’est pas encore assez dire ; et si j’ai bien décrit l’amour généreux, peut-être penserez-vous qu’il n’a pas tant besoin de se tromper, puisqu’il fait être ce qu’il espère, ce qui est bien mieux que de le supposer. Au reste il faudrait dire de la haine aussi qu’elle ne se trompe guère, faisant naître aussitôt à son image ce que j’ai appelé dans un sens renouvelé la mauvaise foi, et enfin toutes les preuves qu’elle cherche. Mais dans ce monde humain on ne découvre pas le vrai ; bien plutôt on le fait ; et les hommes s’empressent, autant que j’ai vu, de réparer l’erreur que l’on a pu commettre en les jugeant meilleurs ou pires qu’ils ne sont. La seule chose que j’aie maintenant à dire là-dessus, d’après ce que j’ai voulu précédemment expliquer, c’est que celui qui voit le mal ne voit que séparation ou négation, ce qui n’est rien, et