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Page:Alain - Minerve ou de la Sagesse, 1939.djvu/302

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LXXXVIII

IDÉES ET CHOSES

La mécanique ennuie. On n’aime point ce serviteur sans esprit, qui dit une seule chose. Le bruit même des mécaniques est laid. On se lasse aussi de cette partie de la science qui est mécanique, qui ne fait que répéter pièce pour pièce les mécaniques et en promet d’autres. On se lasse du théâtre mécanique, abstrait, sans épaisseur, sans substance aucune, qui se joue sur l’écran, et auquel il faut avouer que la vie urbaine, avec métros, ascenseurs et distributeurs, finit par ressembler trop. On se lasse de ces concerts mécaniques, sans musiciens. Ce monde d’artifices, qui est fait pour nous, qui nous donne exactement ce que nous demandons, comme une pelure séparée, cela ne nourrit point. À quoi répondent les ministres mécaniques et les discours mécaniques. Chevaux de bois, musique enregistrée ; les mêmes passent et repassent. L’opposition a d’autres chansons, non moins connues. Fascisme pour l’écran, socialisme pour l’écran. Il n’y a que le syndicalisme qui se renouvelle un peu, par quelques hommes sauvages.

Quel est ce discours ? Vous voilà donc misanthrope ? Ne voyez-vous pas que ce discours est mécanique aussi ? Patience. D’abord, je vis très content et loin de toutes ces choses, mais j’ai bonne opi-

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