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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/12

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discoureur, au législateur. Cette présence les rassemblait inexplicablement.

Socrate était fait pour déplaire aux hommes d’État, aux orateurs, aux poètes ; il en était recherché. C’est dans le Protagoras que l’on verra le mieux comment ces Importants, en leurs loisirs, se jouaient aux poètes, et aussi comment l’esprit plébéien de Socrate renouvelait ce jeu, par cette curiosité sans armes qui lui était propre. Platon jeune l’entendit en de tels cercles. Les contraires l’un dans l’autre se mirèrent. Le jeu devint pensée et très sérieuse pensée. Platon ne s’est pas mis en scène dans ses Dialogues ; mais on peut voir, au commencement de La République, comment ses deux frères, Adimante et Glaucon, mettent au jeu leur ambition, leur puissance, tout leur avenir. Ce sont deux images de Platon jeune.

Platon, descendant des rois, puissant, équilibré, athlétique, ressemblait sans doute à ces belles statues, si bien assurées d’elles-mêmes. Il faut un rare choc de pensées pour animer ces grands traits, formés pour la politesse et pour le commandement. Leur ave-