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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/20

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est n’importe qui, ou l’homme d’État, ou le petit esclave du Ménon ; c’est Socrate ne s’arrêtant ni à l’ignorance, ni à la mauvaise foi, ni à la frivolité ; Socrate recevant le jugement de l’adversaire, pensant comme lui, assuré de lui et de tous ; Socrate faisant sonner et écoutant sonner l’humain ; cherchant le semblable dans l’autre, ou bien plutôt le trouvant aussitôt, par une amitié jusque-là sans exemple. Sans armes cachées. C’est ainsi que de la société polie il faisait aussitôt société vraie. Tout homme a grand besoin de ce témoin. Platon a vu et touché l’esprit universel en cet homme sans peur ; c’est pourquoi désormais Socrate devait être l’assistant et le témoin de ses meilleures pensées. Et encore maintenant, à travers Platon, c’est vers Socrate que nous regardons. Ce qui nous manque, c’est de croire tout à fait à l’universel ; c’est de le savoir tout présent en la moindre pensée, même qui le nie. Si nous participons nous-mêmes à cette présence de Socrate, nous comprendrons Platon.

Qui tient le Platon des Idées ne tient pas