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Page:Alain - Onze Chapitres sur Platon, 1928.djvu/71

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c’est le fini qui fait paraître la chose. Et observez comment c’est Héraclite lui-même qui se change en Platon, comme Zénon aussi, qui niait le mouvement ; mais c’est peut-être ici le seul cas où, selon le courage socratique, l’adversaire a été pensé d’après la bonne foi. En ce tableau sommaire des formes les plus abstraites se trouve le mouvement au niveau du repos. Il a fallu Héraclite et Zénon ensemble en Platon pour surprendre l’idée dans le spectacle même, et l’immobile dans le mouvement. Car il est assez clair, par cette double négation, que le mouvement n’est point dans les choses ; mais plutôt le mouvement c’est le changement pensé d’après le même, et par la mesure. En disant seulement, et en passant, que le mouvement est une idée, Platon dit beaucoup ; car il est vrai que nous pensons le mouvement comme un tout, et comme un modèle du changement, que le changement ne nous dicte point ; un modèle selon l’esprit, non selon la chose. Il suffit à Platon de nous avertir ; il n’entre point dans ses fins de nous donner le savoir, car, frappant ainsi sur notre cuirasse mortelle, il vise