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Page:Alain - Système des Beaux-Arts.djvu/106

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CHAPITRE VII

DU CONTEMPLATIF

Le poète contemplatif se perd dans l’objet comme l’épique mais son mouvement est moins pressant ; il admet mieux les pauses et les morceaux courts ; le rythme y peut être assez varié, et la composition moins rigoureuse ; car la contemplation suppose des peines affaiblies déjà par le temps, et un bon équilibre. Il n’est pas temps d’expliquer en quel sens les choses de la nature peuvent être dites belles ; ici c’est la poésie qui est belle, et son rythme embellit toutes choses, mais toujours sous la condition que le rythme ne cède pas, ce qui suppose une description des choses, serrée et tout à fait simple. On peut remarquer deux défauts dans les mauvais poèmes descriptifs ; d’abord l’expression y est peu naturelle et évidemment gênée par la loi du rythme ; presque toujours allongée et redondante, comme si la concordance du discours et du rythme était plusieurs fois manquée ; et, d’un autre côté, le rythme manque de ressort et de silences ; il n’est presque toujours que la forme de l’épopée, mais sans le mouvement héroïque. Aussi rien n’appelle le lecteur, et c’est lui qui traîne l’œuvre.

Les mouvements de l’élégiaque peuvent se rencontrer dans le contemplatif, mais à titre d’épisode. Il faut bien remarquer que, dans les poèmes descriptifs les plus puissants, le dessin est simple et serré