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Page:Alain - Système des Beaux-Arts.djvu/323

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DU MOUVEMENT

naturellement par l’effort, qui est figuré lui-même par la forme des membres et des muscles. Il faut donc choisir, parmi les attitudes successives, celles qui correspondent à la tension et au départ. Par exemple, peur les coureurs, il ne faudrait point les dessiner dans le moment où ils se laissent aller à la pesanteur, mais au contraire quand ils prennent appui sur le sol et s’élancent. On comprendra d’après ces vues le hardi dessin du cheval au galop, si différent des vues instantanées obtenues par les procédés mécaniques. Et il est assez clair que, par un bon choix de l’attitude et du moment, le peintre peut représenter le mouvement et le sculpteur de même. Peut-être faut-il dire que la sculpture supporte mieux que la peinture cette usurpation du dessin, parce que les signes de la pensée peuvent s’accorder avec l’action ; pour les signes du sentiment il n’en est pas de même, et c’est un défaut assez commun, et bien choquant, que de donner un visage expressif à l’homme qui agit. C’est là un mauvais mélange des genres. Et l’on peut dire que, dans les œuvres oeintes, surtout peintes de près et par retouches, le mouvement vif est toujours choquant. Dans tous les cas, et aussi bien lorsque le mouvement lent s’accorde avec la couleur, remarquez que c’est la ligne qui donne le mouvement. Il est presque impossible que les figures à demi noyées dans l’ombre picturale soient autrement qu’immobiles. Au reste je propose ici des idées ; que chacun cherche des exemples ; car rien ne remplace l’œuvre.