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Page:Alanic - Les Roses refleurissent.pdf/182

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lèvres pour réprimer des sanglots nerveux. M. Marcenat, aussi bas qu’elle-même avait parlé, reprenait dans un soupir, les yeux noircis au fond des orbites profondes :

— Comment ne vous plaindrais-je pas ? Je sais, mieux que personne, combien certains déboires vous vident le cœur, quand on est jeune et confiant… On ne se remet jamais bien de ces premières blessures… Le meilleur de soi en meurt.

Il s’écarta, ressaisi par de fiévreux souvenirs, et marcha quelques secondes, çà et là, entre les meubles, les bras croisés, la tête courbée. Estelle se laissait, elle aussi, fasciner par les vertigineux mirages surgis du passé. Les fantômes de leurs premières amours glissaient entre eux, ironiques et troublants.

M. Marcenat dompta enfin cet émoi et revint vers Mlle Gerfaux.

— Soyez tranquille ! prononça-t-il avec une douceur qui redoubla en elle l’envie des larmes. Je ne me reconnais point le droit d’exigences excessives, sachant trop en quelle misérable condition je serai prochainement réduit. C’est assez que vous ayez la générosité de m’accorder votre concours, votre aide intelligente. Dans la nuit, perpétuelle peut-être, où je vais tomber, ce sera un réconfort de vous sentir près de moi, comme une amie sûre… Car je ne me