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Page:Alberti- De la statue et de la peinture, 1868.djvu/162

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DE LA PEINTURE

les pieds joints. Surtout que chacun ait bien les inflexions et les mouvements qui lui conviennent. Que ceux-ci soient assis, à genoux, où à demi couchés ; que ceux-là soient nus s’il le faut, ou, par un compromis entre deux formes de l’art, à demi vêtus. Mais ayez soin d’observer toujours la pudeur et la modestie ; que les parties obscènes ou disgracieuses soient voilées par des draperies, par des feuillages, ou bien couvertes avec la main. Apelles, en peignant Antigone, eut soin de représenter son visage du côté où n’était pas le défaut de son œil. On voit dans Homère, là où il décrit Ulysse naufragé sortant, à son réveil, de la forêt et s’avançant à la voix de jeunes filles, qu’il lui donne un voile de feuilles d’arbres autour des parties honteuses du corps. On raconte que Périclès avait la tête trop longue et mal faite, aussi les peintres et les sculpteurs ne le représentaient pas la tête nue, comme les autres, mais ils le coiffaient d’un casque. Enfin Plutarque nous apprend que les anciens peintres, lorsqu’ils portraituraient des rois, avaient coutume, quant aux défauts, de ne pas vouloir paraître les avoir entièrement négligés, mais de les amender le plus possible. Ainsi donc, j’entends que la pudeur et la modestie soient si bien observées dans un sujet, que les laideurs soient laissées de côté, ou tout au moins arrangées. Je pense enfin, comme je l’ai dit, faire extrêmement en sorte que le même geste ou que la même attitude ne se trouve pas répétée dans un tableau.

Un sujet sera capable d’émouvoir les spectateurs lorsque des personnages immobiles y manifesteront fortement