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Page:Alberti- De la statue et de la peinture, 1868.djvu/189

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jamais peindre un objet dont il ne connaîtrait pas toutes les saillies. Or, les saillies sont plus facilement trouvées, par la sculpture que par la peinture. Et véritablement ce n’est pas pour la chose un argument sans valeur que ce fait qu’en tout temps il a pu y avoir des sculpteurs médiocres, tandis que presque tous les peintres ont été ridicules et tout à fait inhabiles.

Que vous étudiiez la peinture ou la sculpture, il faut toujours vous proposer de regarder et d’imiter quelque modèle élégant et rare. J’estime qu’en l’imitant, il faille y apporter du soin joint à de la célérité, de telle sorte que le peintre n’aborde jamais son œuvre, avec le pinceau ou le crayon, sans avoir, tout d’abord, arrêté parfaitement dans son esprit ce qu’il doit entreprendre, ainsi que les perfectionnements qu’il doit y apporter. En effet, il est plus sûr d’écarter les erreurs par la pensée que de les racler par le travail. D’ailleurs, il arrive qu’en nous accoutumant à tout faire d’après une composition méditée, nous nous rendons des artistes beaucoup plus habiles, ainsi que fut cet Asclépiodore, qu’on rapporte avoir été le plus expéditif à peindre qui fut entre tous. Car l’esprit mis en mouvement par l’exercice devient en toute chose plus prompt, plus apte et plus habile, et la main conduite par une règle certaine du génie acquerra une grande célérité.

Mais ce qui fait que quelques peintres sont paresseux, c’est très-certainement parce qu’ils s’essayent lentement et tristement à une chose que leur esprit ne leur a pas