Aller au contenu

Page:Alexandri - Ballades et Chants populaires de la Roumanie, 1855.djvu/151

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

péchés, il n’est pas vrai qu’il ait jamais existé d’alliance entre les corbeaux et les hirondelles, ni entre les fleurs et les serpents, ni entre les ours et les chevreuils, ni entre le soleil et les nuages. »

« Brûle donc au milieu des flammes allumées par nos mains et deviens un brasier ardent, deviens un noir charbon, transforme-toi en vampire, change-toi en négresse si tu veux donner ton amour à un nègre. »

La flamme montait ; Kira gémissait et pleurait éperdument ; son corps se tordait dans les douleurs et sa voix éteinte criait : « Oh ! mes frères bien-aimés je vous en supplie tous les trois… Pitié, pitié pour une pauvre fille… je suis innocente par mon Dieu… innocente… »

La flamme montait toujours et l’enveloppait de toutes parts. De blanc qu’il était, son corps charmant prenait d’abord une teinte rousse, puis rouge, puis noire ; les chairs brûlaient en frémissant, les os craquaient, et la malheureuse tremblait de tous ses membres, luttant contre la mort au milieu des flammes.

Pauvre fille ! elle jetait un cri terrible, puis un gémissement douloureux, puis un faible soupir, et dans ce soupir elle exhalait son âme.

Alors ses frères ramassaient les restes de son corps, les réduisaient en cendre et les lançaient au vent en s’écriant :

« Ossements chargés de péchés, poudre des ossements, puisse la terre vous engloutir à jamais ! puissent les vents vous porter dans un désert nu et sans bornes, par de-là neuf océans immenses, et par de-là neuf immenses continents !