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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/131

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L’INFORTUNE DE MONSIEUR FRAQUE

M. Fraque en était venu à vivre dans une sorte de somnambulisme en dehors de tout ce qui n’était pas son idée fixe et son tourment secret. Il se levait chaque jour, mangeait, lisait, sortait, rentrait, parlait, à la diable pour ainsi dire et par habitude. Son excentricité voulue d’autrefois s’était changée en étrangeté naturelle, en manie, et confinait maintenant à la folie. Puis, au moindre choc, pour un mot, pour un rien, sur une simple association d’idées, l’homme endolori saignait encore au fond de l’automate.

— Là, tenez ! faisait-il, et du pouce il pressait le cervelet du fils Menu ; les instincts passionnels également très développés…

C’était ce qui faisait les grands criminels, lorsque la passion n’était pas équilibrée par l’intelligence, modérée par la raison. Chez « l’enfant », M. Fraque constatait cet équilibre. « L’enfant » était donc conformé pour devenir quelqu’un, et M. Fraque se trouva tout naturellement amené à lui commencer une sorte d’horoscope. Alors, seulement, il s’aperçut, et laissa voir, qu’il ne savait rien sur le père et la mère du « prix de récitation » couronné par lui.

— Pardon, monsieur, de ne pas m’être nommé plus tôt ! Je suis M. Menu, pasteur de l’Église réformée…

Et comme M. Fraque, n’ayant pas bien entendu, se faisait de la main un cornet acoustique, M. Menu répéta d’une voix stridente :

M. Menu, pasteur de l’Église réformée !