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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/132

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L’INFORTUNE DE MONSIEUR FRAQUE

Ce fut une commotion. M. Fraque, qui avait vu l’avant-veille enlever les échafaudages de la chapelle de la Sainte-Adolescence, se leva frémissant. Il marcha jusqu’à une fenêtre d’un pas saccadé, regarda un moment à travers la vitre le feuillage des beaux marronniers de l’hôtel, rouillés par l’automne. Dans le fond du salon, les Menu, blêmes d’émotion, attendaient en silence.

Puis, M. Fraque revint à pas lents, maître de lui :

— Monsieur le pasteur, vous savez que ce soir vous dînez avec moi, tous les trois…

Madame Menu s’excusa, personnellement ; et, sur un clignement d’œil de son mari, elle prit congé et se retira avec Eudoxe. M. Menu, lui, resta.

Telle fut l’origine de la grande intimité de M. Fraque avec les Menu. Noirfond ne tarda pas à en faire des gorges-chaudes. Le docteur Boisvert alla jusqu’à colporter la nouvelle, que M. Fraque devait sous peu, en haine de la dévotion de sa femme, se convertir solennellement au protestantisme. En effet, M. Fraque n’avait pas remis les pieds à l’évêché. M. Fraque dînait plusieurs fois par semaine chez le pasteur protestant. À chaque instant du jour, Isnard allait chercher les Menu de la part de son maître. Dehors, on ne rencontrait plus M. Fraque sans quelque Menu au côté. À cinq heures, il n’était pas rare de voir M. Fraque se promener de long en large, devant la porte du collège, en attendant la sortie des élèves. La cloche retentissait enfin. Eudoxe arrivait, ses livres sous le