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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/133

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L’INFORTUNE DE MONSIEUR FRAQUE

bras, et sautait au cou de M. Fraque, comme s’il s’agissait d’un père ou d’un oncle à héritage.

Les Menu finirent par prendre pied à l’hôtel de Beaumont. Eudoxe, maintenant, venait tous les jours faire ses devoirs dans la petite pièce précédant le cabinet de M. Fraque, sur la même table où le jeune Firmin traçait jadis ses arabesques à la plume. Il ne se gênait pas non plus pour amener des camarades. Ces messieurs, rhétoriciens ou philosophes, entraient par la petite porte, considéraient le jardin comme à eux, faisaient bruire leurs ébats — toute une troublante vie nouvelle — sous les antiques marronniers ; et la fumée de leurs cigarettes donnait peut-être la nausée aux statues stupéfaites. M. Menu passait quelquefois des heures à lire sous une tonnelle, tout au fond. Madame Menu arrivait chaque après-midi. Le concierge et Isnard ayant reçu des ordres, elle montait droit au cabinet de M. Fraque, sans demander personne, s’installait dans une embrasure de fenêtre, et sortait son ouvrage d’un petit sac verni.

Enfin, un soir, le docteur Boisvert dit en plein cercle :

— Vous ne savez pas, messieurs ? M. Fraque vient de l’échapper belle… Un commencement de fluxion de poitrine ! J’ai fait appliquer tout à temps un bon vésicatoire… Eh bien, vous ne devineriez jamais qui lui a servi de garde-malade ?

— Sa femme ? jeta avec un fin sourire un monsieur, qui faisait la partie de dames de M. le maire.

— Ah ! bien oui, sa femme ! Si vous disiez la femme