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JOURNAL DE MONSIEUR MURE.

comble à son exaspération. Et, la menaçant du poing, comme si X… tout entière était l’ennemie de sa fille :

— C’est là qu’elles sont, s’écria-t-il, ces femmes !… Maintenant elles ouvrent à peine les yeux, et elles s’étirent dans leur lit. Tas de bougresses !…

Et, pendant tout le temps que nous suivîmes le boulevard Saint-Jean, il me fallut écouter la chronique scandaleuse de X… Un tas d’histoires, bien connues, vraies ou fausses, en circulation sur le compte de celle-ci, de celle-là. Madame « une telle » ne rendait-elle pas son mari la risée de la ville ? Et madame B., femme d’un juge au tribunal, en avait-on assez jasé, sous l’avant-dernier sous-préfet ? Madame V., femme d’un riche banquier, au su et connu de tous, une chienne en folie ! Le soir, de tout jeunes gens la suivaient… Et madame de N. N., une marquise celle-là, une marquise authentique, depuis cinq ans n’entretenait-elle pas dans son hôtel, sous le même toit que son mari, un étudiant corse sans fortune !… Et la de K., qu’on voyait partout avec des officiers de divers grades !… La C., surprise un matin avec un prêtre !… Et la D. ! et la E. ! et la F. !, etc., etc… Il ne tarissait pas. Noblesse, magistrature, barreau, fonctionnarisme, commerce, — des femmes de toutes castes, — y passaient : le dénombrement complet de X… Parfois, à un nom prononcé, sa main désignait, par-dessus le rempart couronné de lierre, les marronniers de quelque antique hôtel… Toutes acceptées, pourtant, reçues partout, accueillies à bras ouverts ;