Aller au contenu

Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/336

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
324
JOURNAL DE MONSIEUR MURE.

cheval de renfort. Grande, élancée, très simplement mise, sa robe noire faisait pourtant tache d’élégance et d’aristocratie au milieu de la banalité des passants : employés, ouvriers en blouse de travail, demoiselles de magasin revenant de l’intérieur de Paris. Çà et là, des têtes se retournaient pour la voir. Quand elle eut dépassé un grand café au fond duquel un bec de gaz était déjà allumé, un garçon sortit, s’avança jusqu’au milieu du trottoir, la regarda s’éloigner.

Un moment, je ne la vis plus : elle venait d’entrer dans une boutique. Chez un fleuriste, dont l’étalage vert et embaumé mettait un coin de printemps entre une charcuterie et un marchand de vins. Elle en ressortit avec un petit bouquet de violettes.

À la Fourche, laissant en arrière le côtier et son cheval, l’omnibus partit au trot vers l’intérieur de Paris. Elle, s’arrêta une minute, tournée vers l’avenue de Saint-Ouen, s’intéressant peut-être à la double rangée interminable de becs de gaz, allumés dans le crépuscule, enfonçant leurs points d’or jusqu’à la banlieue. Attendait-elle quelqu’un, devant sortir d’une de ces premières maisons, laides et basses ? Elle regardait aussi plus loin, là où l’avenue s’encanaillait encore jusqu’à devenir vers la barrière un quartier de chiffonniers. Ne voyant rien venir, elle continua à remonter l’avenue de Clichy. Déjà, en haut, l’omnibus disparaissait derrière le monument du maréchal Moncey.

À la hauteur d’un petit bal, comme elle venait de