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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/337

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JOURNAL DE MONSIEUR MURE.

passer sur le trottoir de droite, tout à coup, presque au-dessus de sa tête, des lettres de feu, « Bal du Chalet », s’allumèrent. Elle dut faire un brusque détour : deux voyous en casquette molle faisaient irruption hors du bastringue, tombèrent presque sur elle, en boxant pour la frime. Hélène ne se retourna pas ; mais jusqu’au restaurant du Père Lathuile, elle marcha plus vite.

Maintenant, elle était place Moncey, devant le maréchal appuyé sur son canon, défendant l’ancienne barrière dans un héroïsme de dessus de pendule. Baignée dans un crépuscule bleuâtre, la place agrandie. À gauche, le boulevard de Clichy ; à droite, le boulevard des Batignolles, se continuant l’un l’autre, très larges, donnant l’idée d’une ceinture sans fin faisant le tour de Paris. En face, les devantures contiguës de deux cafés, mettant un flamboiement à l’entrée de la rue de Clichy qui descend vers le cœur de la ville. Hélène, au bout du trottoir, arrêtée, semblait indécise, Qu’allait-elle faire ? traverser la place, entrer au bureau d’omnibus, demander un de ces fiacres de la station, qui attendaient à la file, avec leurs lanternes rouges, vertes, jaunes, allumées ? Peut-être continuer le long des boulevards extérieurs une promenade sans but ? Peut-être, revenir tout de suite sur ses pas, n’avoir pas le courage d’aller plus loin, rentrer ?

Un orgue de Barbarie criard s’entendait au milieu du boulevard des Batignolles. D’un petit café-con-