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Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/53

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LA FIN DE LUCIE PELLEGRIN

Elles se servaient, emplissant leurs verres à côté des tasses de la malade, d’une cafetière où il devait rester de la tisane froide. Les bouteilles et les carafons du café, la carafe frappée, les biscuits, se mêlaient à toute une pharmacie de fioles à potion étiquetées.

— À ta santé ! ma bonne, fit la grande Adèle élevant, la première, son verre d’absinthe.

— Et moi, dit Lucie Pellegrin, tu t’imagines que je vais vous regarder ! Est-ce qu’on m’oublie ?

Et, comme l’autre Adèle, la bouche déjà pleine de biscuits trempés dans son madère, lui conseillait le madère :

— Laissez, madame Printemps va me servir, elle sait bien ce qu’il me faut.

Quand elle eut aussi son absinthe que lui versa complaisamment la concierge, Lucie Pellegrin, tenant le verre à deux mains, voulut trinquer avec tout le monde. Elle était si faible, qu’elle tremblait : un peu d’absinthe se répandit.

— Ça nettoie ! dit-elle gaiement.

Les autres aussi étaient gaies. Miss les faisait rire aux éclats, le museau en l’air, dévorant des yeux le sucrier, où madame Printemps fouillait à chaque instant pour rendre son grog doux comme du sirop.

— Ça a des envies comme une femme, voyez-vous, une chienne enceinte, disait Héloïse.

Alors, tout en s’amusant à donner, tantôt l’une, tantôt l’autre, du sucre à Miss, elles se mirent à parler de leurs divers « envies ». L’autre Adèle se sou-