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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/109

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    1. MESSIANISME##


MESSIANISME, LA LITTÉRATURE APOCRYPHE

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mourra, » 11 (texte hébreu). Par cette phrase l’auteur semble vouloir dire que ceux qui verront Élie peuvent tranquillement quitter la vie, car ils y reviendront bientôt par la résurrection ; voir J. Peters, Das Buch Jésus Sirach oder Ecclesiasticus, 1913, p. 412 sq.

Le livre de la Sagesse et le IIe livre des Machabées qui ont pris origine dans le milieu hellénique ne font pas allusion à l’espérance messianique.


II. ÉTUDE ANALYTIQUE : LE MESSIANISME DANS LA LITTÉRATURE NON CANONIQUE.

Après avoir étudié le messianisme tel qu’il se rencontre dans les livres inspirés de l’Ancien Testament, nous sommes encore loin d’en connaître toutes les formes. Car aux prophéties messianiques de la littérature canonique succèdent, dans la littérature apocryphe, une foule de prétendues révélations sur la fin des temps et, dans la littérature rabbinique, de nombreuses spéculations sur l’avenir d’Israël et du monde. Les premières se présentent comme un complément, les dernières comme une interprétation des oracles des anciens prophètes. —
I. La littérature apocryphe.
II. La littérature rabbinique (col. 1526).

I. La littérature apocryphe. —

A ce point de vue, les écrits apocryphes l’emportent de beaucoup sur les produits rabbiniques.

Ils témoignent de la manière intense dont les Juifs, durant les deux siècles qui précédèrent et qui suivirent l’apparition du Christ, ont entretenu l’espérance messianique. Les causes de cette manifestation étaient d’un côté l’état malheureux qui résulta successivement de la persécution d’Antiochus Épiphane (175-164 av. J. -C), de la prise de Jérusalem par Pompée (63 av. J.-C), de la destruction de la ville sainte par Titus en 70 après J.-C, état si pénible pour les Israélites croyants que la perspective messianique restait leur seul soutien, de l’autre l’enthousiasme religieux et national excité par les victoires des Machabées et le règne glorieux des premiers Asmonéens, événements qui furent plus ou moins considérés comme des signes précurseurs de l’approche de l’ère du bonheur définitif.

La plupart des livres apocryphes ont pour thème principal l’eschatologie tant messianique que transcendante et portent, à cause de leurs révélations sur l’avenir et sur l’autre monde, le nom d’apocalypses. D’autres, tout en ayant un contenu légendaire ou didactique, renferment néanmoins de remarquables passages messianiques.

Les conceptions qu’ils développent sur la fin des temps actuels sont des plus variées ; parfois elles sont bizarres et assez souvent obscures. Le manque de clarté est surtout dû au langage symbolique et indéterminé qui y est employé de préférence, et à l’incertitude qui plane sur la date de presque tous ces écrits et par conséquent sur la situation historique qu’ils reflètent. Malgré leurs éléments fantastiques et leurs nombreuses obscurités, ces textes sont très importants pour la connaissance du messianisme. « Ils comblent la lacune littéraire qui s’étend entre l’Ancien et le Nouveau Testament, et, par les espérances si hautement messianiques, qui sont leur caractéristique commune, ils sont comme une sorte de prolongement et d’épilogue des prophètes canoniques, en même temps que le prologue de l’Évangile. » P. Batiffol, Dictionnaire de la Bible, t. i, col. 757.

Le livre d’Hénoch.


La plus importante et, semble-t-il, la plus ancienne des apocalypses est le livre d’Hénoch. Ce n’est d’ailleurs pas un ouvrage d’un seul jet, mais un conglomérat d’écrits divers, tous attribués au patriarche Hénoch.

1. Le premier comprend les chapitres i-xxxvi.

Comme il était connu de l’auteur du Livre des jubiles, iv, 19, qui a écrit sous les rois asmonéens (voir plus bas), il a été composé quelque temps au moins avant ce livre. Mais comme le sentiment national, qui fut si vivement surexcité par la persécution d’Antiochus Épiphane, y manque, il peut être prémachabéen, Lagrange, Le Messianisme, p. 62.

Par leur contenu, ces chapitres forment une apocalypse sur le dernier jugement. L’auteur constate l’immoralité qui règne dans le monde ; tandis que toutes les autres créatures sont soumises aux ordres de Dieu, seuls les hommes les transgressent, v, 2-4. D’où vient cette révolte du genre humain ? Quand et comment cessera-t-elle ? Pour donner la réponse à ces questions, il met en scène Hénoch et lui fait raconter ce qu’il a appris sur le passé et l’avenir de l’humanité au cours de visions et de voyages célestes.

D’abord le patriarche annonce que le retour à l’innocence ne se fera qu’à la fin du monde par un grand jugement, i-v. Dieu, entouré de myriades d’anges, i, 9, descendra sur le Sinaï, i, 3-4. Les montagnes seront ébranlées, la terre sera déchirée, i, 6 ; l’angoisse et la peur rempliront les mortels, i, 5, qui tous seront jugés, i, 7. Les impies seront maudits et exterminés de la surface de la terre, i, 9, les justes bénis : « la lumière de Dieu leur luira », i, 8 ; la joie, la paix et la sagesse seront leur part, i, 8 ; v, 7-8. Ils ne commettront plus aucun péché, v, 8, et vivront longtemps dans un bonheur parfait, v, 9.

Après cette sobre description du discours introductoire, se déroulent dans l’exposé principal, vi-xxxvi, les tableaux les plus fantastiques. Ils ont trait en premier lieu à l’origine et aux suites du péché : Le mal a été introduit dans le monde par la chute des anges, c’est-à-dire par l’union charnelle de deux cents esprits célestes avec les filles des hommes, vi-viii. Pour les punir, Dieu les fit enchaîner par les archanges et jeter sous des collines, où ils attendent leur condamnation définitive, qui aura lieu à l’occasion du grand jugement. Alors ils sortiront de leurs cachots souterrains pour être précipités dans un abîme de feu, x, 12-13 ; xi-xvi ; xviii, 11-xix, 9 ; xxi.

Le voyant complète ensuite ses premières indications sur le bonheur des justes à la fin des temps : Les élus vivront plus longtemps que les premiers patriarches, xxv, 6, ils auront mille enfants, x, 17 ; toute la terre sera couverte d’arbres fruitiers et remplie de bénédictions, x, 18-19. Aucune mauvaise œuvre n’y sera plus faite, x, 16, 22, et tous les peuples adoreront le vrai Dieu, x, 21. Le centre de la terre sera un endroit particulièrement béni. Il n’est autre que Jérusalem, xxvi-xxvii. Là, près de la maison de Dieu, sera transplanté l’arbre de vie qui se trouve maintenant au bout du monde, xxiv-xxv. Ses fruits et son odeur donneront aux justes joie et longue vie, xxv, 4-6.

La fin de cette seconde partie contient des révélations sur le sort des défunts avant et après le jugemont final. Bien qu’elles fassent partie de l’eschatologie transcendante, nous les mentionnons parce qu’elles sont liées à celles qui se rapportent à l’eschatologie messianique. Hénoch décrit le schéol tel qu’il l’a vu lors d’un de ses voyages. C’est l’endroit où se réunissent les ûmes de tous les morts jusqu’au grand jugement, xxii, 3-4. Il est divisé en quatre compartiments dont deux reçoivent les pécheurs, deux les justes. Parmi les pécheurs, le patriarche distingue ceux qui ont été déjà punis sur terre et ceux qui sont morts sans châtiment terrestre. Les premiers resteront toujours dans le schéol, parce que leur sort est moins dur que celui qui attend les autres, lors du jugement. Ces derniers remonteront du schéol comme les mauvais anges de leur prison, et comme eux ils seront