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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/280

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MIRACLE, VALEUR PROBANTE


lui. parce que sa mission et sa doctrine étaient suffisamment attestées par l’autorité (auctoritate) de la Loi et des Prophètes. Quodl., ii, a. (i et ad lum, ad 2° m « t ad 3um ; cf. /71 Joannem, c. xv, lect. 5. Les uns se laissent amener à la foi par les miracles, d’autres « par la sagesse » des Écritures. In Joannem, c. 1, lect. 3. La foi n’a pas besoin de l'évidence des motifs de crédibilité : d’autres raisons de croire, sans faire l'évidence, suffisent à déterminer une adhésion ferme. Bien plus, dans les cas exceptionnels, sous forme d’illumination intérieure, la grâce peut même suppléer à tout motif naturel de crédibilité. Voir Sum. Iheol.. F, q. 1, a. 1 ; q. 11, a. 2, ad lum ; IIa-IIæ, q. 11, a. 4 ; Cont. Gentes, t. I, c. rv ; t. III, c. xxxix : De veritate, <. xiv, a. 9 et 10 : In Boeth. de Trinitate, q. ni, a. 1, et surtout De veritate, q. xiv, a. 11, ad l" m ; rapprocher In lll" m Sent., dist. XXV, q. 11, a. l.sol. 1, ad 1°"' et 2um. Tous ces points de la doctrine de saint Thomas ont été développés par le P. de Poulpiquet, Le miracle et ses suppléances, Paris, 1913, p. 1-113.

De ces données, on peut conclure que l’argument tiré du miracle pour prouver l’origine divine d’une doctrine, n’est pas une démonstration directe a priori, descendant de la cause à l’effet, telle que la démonstration de l’immortalité de l'âme déduite de sa spiritualité. Elle n’est pas non plus une démonstration directe a posteriori, en remontant de l’elTet à la cause, telle que la démonstration de l’existence de Dieu, cause première. C’est une démonstration indirecte tirée de la certitude même du signe, démonstration qui conclut à la vérité de la doctrine, en raison des absurdités ou des impossiblités qui découleraient de l’hypothèse contraire. Cette démonstration indirecte ne nous fournit pas, comme la démonstration directe, la claire vue de la vérité connue en elle-même, mais elle exclut toute crainte d’erreur en raison des absurdités que comporterait cette erreur. Cf. Zigliara, Summa philos., t. 1, p. 150. Voir, dans saint Thomas, l’argument indirect ex signo, Sum. iheol., III a, q. lv, a. 5 ; argument très certain, Id., ibid., q. xi.ui, a. 1 ; cf. IP-II 36, q. clxxviii, a. 1 ; q. v, a. 2 ; Cont. Gentes., t. III, c. clv ; Quodl., 11, a. 0, ad Ium ; cf. In Joannem, c. ix, lect. 3, 11. 8 ; In ///> » ' Sent., dist. XXIII, q. iii, a. 2, ad 2, , m ; dist. XXIV, q. i, a. 2, sol. 2, ad 4um ; dist. XXV, q. 11, a. 1, sol. 2, ad 4° m.

3. Question subsidiaire : la connaissance certaine du miracle requiert-elle la grâce de la /o('?v^La doctrine du rôle du miracle dans la crédibilité des mystères révélés a été acceptée, telle qu’on vient de l’exposer d’après saint Thomas, par l’ensemble des théologiens catholiques, soit par ceux qui enseignent que la grâce de la foi n’est pas absolument nécessaire pour adhérer nu motif formel de cette vertu théologale (Scot, Durand, les nominalistes, Molina, Ripalda, de Coninck. de Lugo, Billot, Lahousse. Mendive, Palmieri, Scbiffini. etc.), soit par les thomistes qui affirment que « la révélation divine, en tant qu’elle est essentiellement surnaturelle (quoad substantiam) ou procède de Dieu auteur de la grâce et constitue le motif formel de la foi infuse, ne peut être connue que par cette foi qu’elle spécifie ». Garrigou-Lagrange. La grâce de la foi et le miracle, dans Revue thomiste, 11)18. p. 305. Tous admettent que le miracle, même en tant qu’il est par sa cause surnaturel quoad modum, peut être connu naturellement, comme on connaît naturellement la véracité de Dieu auteur de la nature : < De ce point de vue intérieur et extérieur, ajoute le P. GarrigouI.agrange, toc. cit., note 1, le fait de la révélation est considéré, non pas comme un mystère essentiellement surnaturel, mais comme une intervention miraculeuse de Dieu dans l’esprit du prophète, elle-même confirmée par un miracle sensible… La fin du miracle, qui est l'évidente crédibilité des vérités révélées, est donc

naturellement connaissable. Ainsi l'Église est visible par ses notes, mais la vie intime de l'Église est un mystère accessible seulement à la foi. Ainsi encore saint Thomas dit de l’apôtre saint Thomas : Vidit hominem et cicatrices, et ex hoc crethdit divinitatem resurgentis. In Joannem, c. xx. lect. m ; Sum. Iheol., Iia-II », q. 1, a. 4.

A rencontre de cette doctrine commune, quelques auteurs, affirmant que la lumière de grâce est absolument nécessaire même pour la perception des signes de crédibilité, n’acceptent pas que le miracle, comme signe divin, puisse être objet de connaissance nal urëlle. Les signes de crédibilité « sont des signes surnaturels ou. comme dit saint Thomas, des effets surnaturels ; ils requièrent donc, pour être connus sous leur raison formelle d'être surnaturel, une faculté correspondante, « accordée », de même ordre, c’est-àdire une faculté surnaturelle : si l’on prend le plus éclatant de ces signes, le miracle, on dira que la lumière de la grâce est nécessaire pour connaître le miracle ». J. Huby, Miracle et lumière de grâce, dans Recherches de science religieuse, 1918, p. 51-55 : cf. P. Rousselot, Les yeux de la foi, ibid.. 1010, p. 173 : Remarque* sur l’histoire de la notion de foi naturelle, p. 33.

Cette thèse, du moins en ce qui concerne la connaissance naturelle du miracle, ne semble pas d’accord avec la doctrine de l’Ecriture et de l'Église. Elle supposerait que les Pharisiens, du fait qu’ils résistaient à la lumière intérieure de la grâce, étaient incapables de discerner l’origine divine des miracles les plus éclatants. Mais alors, comment Jésus-Christ a-t-il pu dire : < Si je n’avais pas fait au milieu d’eux des œuvres que nul autre n’a faites, ils seraient sans péché ; mais maintenant ils ont vii, et ils me haïssent moi et mon Père. » Joa., ? xv, 21 Les princes des prêtres qui « délibérèrent île faire mourir Lazare » pour qu’on ne parlât plus de sa résurrection, doutaientils de l’origine divine de celle-ci ? Les pharisiens doutaient-ils que la guérison de l’aveugle-né fût un miracle d’origine divine, Joa., ix ? La même question peut se poser au sujet des membres, du sanhédrin délibérant sur un miracle de saint Pierre, Act., iv, 10. Enfin, le péché commis contre le Saint-Esprit par les Pharisiens n’allait-il pas jusqu'à attribuer au démon des miracles qui manifestement pour eux-mêmes venaient de Dieu ? Cf. Garrigou-Lagrange, La grâce de la foi et le miracle, dans Revue thomiste, 1018. p. 299-300. D’autre part, si la lumière de grâce est absolument nécessaire pour discerner le miracle avec certitude, on ne comprend plus les textes conciliaires : cum Dei omnipotentiam luculenter commonstrenl, divimv revelationis signa ckrtissima et omnium intelligen 1 1 1 : accommodata. Et encore : Si guis dixerit miracula certo gognosci nunqnam passe, nec iis divinam religionis christianæ originem rite frorari, a. s. DenzingerBannw., n. 1700, 1813. « Si aucune intelligence, même celle du démon, ne peut, par ses seules forces naturelles discerner certainement les miracles, pourquoi ceux-ci sont-ils dits « signes très certains appropriés à l’intelligence de tous » ? Le serment antimoderniste dit même : maxime accommodata. Et que peut-être une preuve véritable (rite probari) de l’origine divine de la religion chrétienne, dont la force probante serait inaccessible â l’intelligence naturelle des plus grands philosophes et théologiens, et même â l’intelligence naturelle des anges ? » (larrigou-Lagrange, id., ibid., p. 300. A ces arguments d’autorité, on peut ajouter les annotalion.es au schéma prosynodal du concile du Vatican. Cf. Vacant, Études…, Documents, t. 1, p. 503.

La thèse du P. Huby, concernant la connaissance du miracle comme tel, peut se résumer en deux points : connaissance naturelle de la matérialité du fait du miracle ; connaissance surnaturelle du caractère