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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/485

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M0N0PHYS1TE (ÉGLISE COPTE), ORGANISATION

patriarches ont aussi abusé des peines canoniques contre les évêqucs, et l’on a dû élaborer plusieurs constitutions pour régler l’usage de l’excommunication, qui ne doit être lancée que pour des fautes très graves. Au patriarche appartient également le droit de dispense des lois canoniques. Ce droit a donné lieu à bien des abus, surtout par rapport aux ordinations. L’autorité patriarcale a souvent trouvé une barrière dans la résistance des évêques et du peuple ; mais on n’est pas allé jusqu’à déposer les patriarches indignes ou scandaleux, du moins sous la domination arabe. Sous les Turcs, au contraire, les dépositions par le pouvoir civil, dues à des manœuvres simoniaques, n’ont pas été rares chez les Coptes comme chez les autres chrétiens de l’empire ottoman.

On a vu plus haut que le patriarche copte prend habituellement le titre, tout à fait traditionnel, d’archevêque d’Alexandrie. Il ne s’arroge pas, comme le patriarche melkite de la même ville, le titre pompeux de juge de l’univers, xpt, -nr, ç tîjç olxouu, svy)< ;. Mais, lorsque ses subordonnés lui écrivent, ils usent volontiers de dénominations dont est prodigue l’emphase orientale : Père des pères, évêque des évêques, patriarche d’Alexandrie, etc.

Les évêques, même ceux qui portent le titre honorifique de métropolite, sont tous égaux en droit et en autorité. L’ordre de préséance est réglé par la date de consécration. Le candidat à l’épiscopat doit être célibataire, avoir au moins 50 ans d’âge, et mener, tout comme le patriarche, la vie austère des moines à partir de son ordination. Un veuf d’un premier mariage peut être choisi. La plupart du temps, ce’sont des moines qui sont élevés à cette dignité, les prêtres séculiers étant régulièrement engagés dans les liens du mariage.

La formation cléricale du clergé séculier a été pour ainsi dire nulle jusqu’à ces derniers temps. On nous le dépeint comme débitant par cœur, sans les comprendre, les formules liturgiques du missel et du rituel coptes. Un séminaire a cependant été fondé au Caire en ces dernières années. Jean XIX, qui vient d’être élu, a promis de relever l’enseignement de cet établissement et d’envoyer quelques jeunes clercs prendre les grades théologiques à l’étranger. Disons que, parmi les prêtres séculiers, quelques-uns portent le titre de kommos (ou ghomos), nom qui désigne proprement l’abbé d’un monastère, et vient vraisemblablement du grec tjyoûjjuîvoç. Pour les séculiers, c’est un titre honorifique qui correspond à peu près à celui d’archiprêtre ou de doyen.

Malgré toutes les vexations et les persécutions continuelles, l’Église copte n’a jamais manqué complètement de moines. De nos jours, l’état dumonachisme n’est pas brillant. Des nombreux monastères du passé il n’en reste guère que sept ou huit qui soient habités. En dehors du monastère patriarcal de Saint-Mercourios, au Vieux-Caire, on en signale un dans le désert de Libye, trois au désert de Nitrïe (celui de Saint-Macaire, bien déchu de son ancienne splendeur, celui de la Vierge ou des syrienset celui des romains, c’est-à-dire des Saints-Maxime-et-Dométius, avec une moyenne de 12 à 20 moines), deux dans le désert oriental vers la mer Rouge (Saint-Antoine et Saint-Paul), un dans la province d’Assiout, celui de Mo narrait, le plus peuplé de tous aveeses 80 moines. Comme nous l’avons dit plus haut, l’abbé d’un monastère OU kommos ( = r i YOÛ[i.evoç) reçoit une consécration spéciale analogue au rite de l’ordination

sacramentelle. La vie du moine copte actuel est sensiblement la même que celle des anciens cénobites dont parle l’histoire : abstinence perpétuelle, jeûnes

fréquents, récitation de l’office, travail manuel modéré.

L’étude et les travaux intellectuels n’ont jamais

été en honneur. Quant aux religieuses, c’est à peine si l’on en trouve quelques-unes au Caire, habitant deux ou trois couvents.

L’Église copte n’a pas échappé à la crise que devait nécessairement amener le régime de liberté inauguré par Méhémet Ali, régime qui s’est accentué depuis l’occupation anglaise. La lutte entre le conservatisme du clergé et le libéralisme d’une minorité de laïcs instruits, ayant subi l’influence des missionnaires protestants, a commencé vers 1840 et n’a pas cessé depuis. La situation s’est aggravée à partir de 1890 par le fait de la fondation des écoles dites deTewfik, établies par les presbytériens d’Amérique, où la jeunesse copte puise des idées et des tendances hostiles aux vieilles traditions et à l’autorité du clergé. Celui-ci lutte péniblement par ses propres écoles, consistant en un collège ecclésiastique ou séminaire (50 élèves environ), six écoles de garçons réunissant 1 100 élèves, deux écoles de filles, avec 350 élèves. On compte aussi six écoles privées, cinq de garçons et une de filles, distribuant l’enseignement à 300 enfants environ. Sous le long patriarcat de Cyrille V (1874-1927), les conflits entre le patriarche et les notables partisans des réformes ont été fréquents. Ces notables ont voulu enlever au patriarche et aux évêques la gestion des biens ecclésiastiques, et les cantonner dans les fonctions purement liturgiques, à l’exemple de ce qui se passe dans plusieurs Églises orientales dissidentes. En 1892, ils obtinrent du khédive Abbas-Hilmi la déposition du patriarche et sa relégation dans un monastère ; mais, devant le mécontentement général des fidèles, on dut bientôt le rétablir sur son siège (fin de 1893). Depuis ce temps, la lutte a continué entre le clergé et les laïcs. Elle a tourné à l’aigu lors de la vacance du siège (7 août 1927). La majorité laïque du conseil national, chargé de surveiller l’administration des biens ecclésiastiques ; voulut s’arroger la direction des affaires en attendant l’élection d’un nouveau patriarche. Mais l’épiscopat lui a tenu tête et a nommé un de ses membres administrateur ecclésiastique. Après plus d’un an de discussions et de violentes polémiques, le gouvernement égyptien est intervenu pour amener à composition les deux partis en présence, qui se sont fait des concessions mutuelles pour ce qui regarde l’administration des biens. On s’est mis aussi d’accord sur le mode d’élection du patriarche. Une assemblée composée des évêques et supérieurs des monastères (soit 24 membres), du conseil national (24 membres) et de 48 notables, a donné comme successeur à Cyrille V, le métropolite de la région d’Alexandrie, Amba Yohannès, âgé de 72 ans. C’est le 113e patriarche de la liste copte depuis saint Marc et le 19° du nom de Jean. Il va avoir à s’occuper de la rédaction d’un statut organique qui donnera à l’Église copte une physionomie nouvelle, et fera sans doute sauter les cadres traditionnels. L’espèce de momification, dans laquelle cette Église a vécu pendant tant de siècles, ne peut plus tenir devant les idées nouvelles et l’exemple des autres Églises orientales. L’antique stagnation n’a pu se maintenir si longtemps que par l’isolement.

Nous n’avons encore rien ditdes relations de l’Eglise copte avec les autres Églises monophysites. On sait que cette Kglisc est complètement autonome et Indépendante par rappoi t aux autres, et n’admet point d’immixtion étrangère. Au vi-vue siècle. le patriarche d’Alexandrie, qui restait le premier par ordre de préséance dans le groupe inonophysile, essaya de jouer au pape et de se mêler des affaires de l’Église syrienne. Ce fut surtout le cas du patriarche Dainien. Mais ces tentatives cessèrent à partir de la complète arabe. Depuis cette époque, les patriarches coptes