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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/579

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    1. MORALE##


MORALE, HISTOIRE SOMMAIRE. V « PÉRIODE

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pour but de défendre les vérités morales attaquées par les protestants, les jansénistes ou les quiétistes, ou de donner une synthèse de l’enseignement positif, on rencontre un bon emploi de la méthode positive, et même de la méthode scolastique.

Les ouvrages de Thomassin, de Benoît XIV, de Zæcaria, du cardinal Gerdil, et quelques écrits sur la morale des Pères de l’Église, se font remarquer par une excellente documentation positive ou historique.

Controverses.

Assez fréquemment l’on défend,

contre les protestants, les jansénistes et les quiétistes, les vérités morales attaquées par eux. Mais, le plus souvent, c’est entre théologiens catholiques que la polémique sévit, parfois avec des outrances regrettables. Ces controverses portent sur les systèmes tutioristes ou laxistes, plusieurs fois condamnés par le Saint-Siège, Denzinger, Enchiridion, n. 1101 sq., 1151 sq., 1691 sq. ; le « péché philosophique » ; la nature de l’attrition admise comme suffisante avec la réception du sacrement de pénitence, Enchiridion, 1146 ; le caractère plus ou moins idolâtrique de divers rites tolérés en pays de mission, etc., etc.

4° L’enseignement social, pendant cette période, à part quelques théologiens qui en morale comme en dogme, restent fidèles à la synthèse de saint Thomas, est peu explicite, surtout dans les ouvrages de théologie morale où domine la tendance casuistique, vraisemblablement à cause du point de vue plutôt individualiste auquel se place d’ordinaire la casuistique.

Relativement aux matières juridico-sociales, l’on ne rencontre guère, chez les nombreux auteurs surtout adonnés à la casuistique, que des questions particulières comme celles-ci : les princes séculiers sont-ils tenus de choisir les plus dignes pour les charges séculières ? un souverain peut-il vendre les charges séculières ? ou quelques cas de conscience concernant le droit de faire la guerre ou la manière de la faire.

Relativement au droit de propriété individuelle, l’on ne rencontre le plus souvent qu’une indication rapide des modes légitimes d’acquisition de ce droit ou quelque question particulière concernant les cas où il est permis de s’approprier des biens appartenant aux infidèles turcs.

Quant au juste prix dans le contrat d’achat et de vente, l’on se borne habituellement à des questions particulières, comme les divers monopoles ou les circonstances diverses qui peuvent autoriser à acheter à un prix inférieur, ou à vendre à un prix inférieur.

D’ailleurs toutes ces réponses contiennent, assez fidèlement, la doctrine précédemment exposée d’une manière plus ample, par les théologiens dont l’autorité est souvent citée.

La question du salaire des serviteurs est traitée à peu près uniquement au point de vue particulier de la légitimité de la compensation occulte dans le cas d’évidente injustice du salaire ; ou de la question particulière de ce qui, dans le cas d’une maladie de quelques mois, est dû au serviteur habituellement payé à l’année.

Toutefois on doit tenir pour certain que la doctrine spéculative précédemment exposée par les théologiens sur toutes ces questions continue à être admise. C’est d’elle ((ne s’inspirent habituellement les brèves indications doctrinales parfois données ; ou au moins c’est elle que supposent les réponses d’ordinaire faites aux questions casuistiques.

V » PÉRIODE. ÉPOQUE CONTEMPORAINE. - Depuis le milieu du xixe siècle, s’est ouverte une nouvelle période, sur laquelle on ne peut encore donner une appréciation complète) mais qui déjà présente des indices d’un nouveau profond et durable.

Ces indices sont principalement les suivants :

1. Le renouveau de la philosophie scolastique, particulièrement appuyée sur l’enseignement de saint Thomas, et qui aura pour conséquence, on peut l’espérer d’après beaucoup de signes déjà manifestes chez un assez grand nombre d’auteurs, un retour réel à la synthèse, à la méthode et à la doctrine de saint Thomas, sans négliger les perfectionnements désirables, ni les applications nouvelles demandées par des circonstances différentes.

Le mouvement de retour à la doctrine de saint Thomas est particulièrement marqué en ce qui concerne les matières juridico-sociales, où il est puissamment aidé par les encycliques de Léon XIII, dont les arguments rationnels sont le plus souvent empruntés à saint Thomas.

2. Le second indice est le renouveau de la méthode positive dans l’étude des Pères et des anciens théologiens, que l’on peut constater dans beaucoup de travaux récents signalés, selon l’occasion, dans les articles du Dictionnaire.

Cette étude, bien conduite, fournira des éléments solides pour une bonne histoire des doctrines morales, où l’on pourra puiser toutes les réponses aux objections de la critique rationaliste, en même temps que l’on y trouvera aussi une aide pour des développements théologiques nouveaux, à condition que cette étude soit toujours faite d’une manière objective, en appliquant aux vérités morales ce qui a été dit de l’étude des vérités dogmatiques, à propos de l’histoire des dogmes, voir t. iv, col. 1648 sq.

3. Un autre indice est la tendance, assez marquée chez beaucoup d’auteurs, à rendre à la philosophie morale et à la théologie morale la haute autorité directrice qui leur convient dans toutes les matières juridico-sociales et économico-sociales.

L’impulsion avait été donnée, en ce qui concerne les matières juridico-sociales par Pie IX réprouvant, dans le Syllabus. divers principes erronés de gouvernement politique, dont plusieurs sont opposés non seulement aux droits de l’Église, mais encore à tout droit moral. Voir particulièrement les propositions 39-55 et 56-64.

Le mouvement fut continué par Léon XIII, qui réprouva de nouveau ces mêmes erreurs et, en même temps, affirma très explicitement dans plusieurs encycliques, notamment Immortelle Dei et Sapientiæ christianæ, les principes chrétiens qui doivent normalement diriger la vie publique des sociétés.

Léon XIII donna aussi une forte impulsion à l’étude des doctrines économico-sociales, en affirmant, d’une manière très explicite, particulièrement dans l’encyclique Rerum novarum, les principes chrétiens qui doivent, en ces matières, diriger toute la vie sociale. Celte impulsion fut continuée par Pie X, soit par le Molu proprio du 18 décembre 1903, renouvelant les enseignements sociaux de Léon XIII, soit par tous les documents concernant l’action catholique, organisée sous la conduite de l’Église et ayant pour but de faire pénétrer les principes chrétiens dans toutes les sociétés humaines.

Sous cette haute impulsion donnée par Pie IX et par Léon XIII, continuée par l’ie X, par Benoit XV dans l’encyclique Ad beatissimi du 1° novembre 1914, § Non hic videtur, et par Pie XI, dans l’encyclique Ubi arcano du 23 décembre 1922, ces matières juridico-sociales et économico-sociales ont commencé à reprendre leur place dans les programmes d’enseignement et dans les manuels de philosophie morale et de théologie morale.

On peut espérer que cet enseignement sera d’une grande utilité pour une sage direction de l’action catho llque, en même temps qu’il est, pour la société civile,