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Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 10.2.djvu/76

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1445 MESSIANISME, LES PROPHÈTES PRÉEXILIENS : NAHUM, HABACUC 1446

en outre maint verset est obscur. De là les opinions les plus discordantes sur le sens et l’origine de ces prophéties. Il y a surtout une forte tendance à nier l’authenticité, sinon de toutes, du moins d’une grande partie d’entre elles, pour les placer après l’exil et les expliquer par la situation et les idées de cette époque. Cependant les arguments qu’on allègue contre l’authenticité des oracles en question sont en majeure partie tendancieux. Abstraction faite de iv, 10 b, qui semble être une glose exilienne, il n’y a, dans les c. iv-v, aucune idée ou situation qui ne cadre avec le vine siècle, ou qui soit en désaccord avec le contenu des passages qui sont reconnus par tous comme originaux. Quelques versets de ces chapitres, ainsi que ii, 12-13, contrastent avec leur contexte immédiat ; mais il en résulte seulement que les textes du livre de Michée sont loin d’être coordonnés d’une façon méthodique, et non que les oracles soient inauthentiques. Seuls les deux cantiques, vii, 8-20, semblent appartenir à l’exil.

Par rapport à leur contenu, les promesses de Michée peuvent, nous semble-t-il, se ramener aux groupes suivants : l.iv, 9-v, 1 ; 2. v, 2-6 ; 3.n, 12-13 ; iv, 6-8 ; v, 7-9 ; 4. v, 10-14 ; iv, 1-4 et être comprises ainsi :

t. iv, 9-v, 1. — Ce texte rappelle les oracles prononcés par Isaïe, xxix-xxxiii, lors de l’invasion de Sennachérib, et semble avoir trait à la même situation. Michée voit se rassembler beaucoup de peuples contre Jérusalem, x, 11 ; ils mettent le siège autour d’elle et frappent les tribus d’Israël (LXX) sur la joue, v, 1. Sion tremble comme une femme en travail, 9, 10. Cependant ces peuples ne réussiront pas à profaner la ville sainte. Au contraire ils ne font, en se réunissant, qu’accomplir le plan conçu par Jahvé pour leur perte. Quand ils seront tassés devant Jérusalem comme les gerbes sur l’aire, Jahvé donnera à la fille de Sion, c’est-à-dire à la population de la ville, cet ordre : « Lève-toi et foule et je te ferai une corne de fer et des sabots d’airain, pour que tu broies des peuples nombreux et voues leur gain à Jahvé et leurs trésors au Seigneur de toute la terre », 13.

2. v, 2-6. — Bien qu’il ne forme pas nécessairement la suite du précédent, ce second morceau le complète par l’annonce que le salut sera réalisé par un roi puissant, le Messie. Ce libérateur sortira de Betléhem, qui aura cet honneur, bien qu’il soit très petit par comparaison avec les autres dans de Juda. Comme il sortira de la souche davidique, le prophète ajoute que ses origines dateront de l’âge antique, des jours du lointain passé, voir van Hoonacker, p. 389 sq. Les Israélites seront opprimés par leurs ennemis jusqu’au moment de sa naissance, date que Michée, par une claire allusion à Is., vii, 14, détermine ainsi : il (Jahvé) les livrera jusqu’à ce que celle qui doit enfanter, enfante, 3 a.

Le premier effet de l’apparition du Messie sera la réconciliation des tribus du Nord et du Sud, 3 b. Le peuple ainsi réconcilié vivra en sécurité par suite du gouvernement puissant de ce roi idéal, dont le prestige s’étendra jusqu’aux extrémités de la terre, 3. Si alors les pires ennemis, les Assyriens, osent encore une fois attaquer Israël, il y aura assez de chefs militaires, donc aussi assez de soldats, pour les repousser et les vaincre dans leur propre pays, 5, 6.

3. ii, 12-13 ; iv, 6-8 ; v, 7-9. — Ces trois groupes de versets, quoique séparés, sont étroitement liés entre eux ; les deux premiers ont très probablement formé primitivement une unité littéraire. Dans tous trois, Michée vise le temps qui doit suivre le désastre. Jahvé réunira ceux qui auront échappé au jugement, comme un berger rassemble les brebis égarées, et les reconduira à Jérusalem, ii, 12-13. Tel est le sens de ces deux versets ; il n’y est question ni de l’évasion des

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

habitants de Jérusalem pendant le siège assyrien (van Hoonacker), ni du retour de l’exil babylonien (Nowack, Guthe, Knabenbauer-Hagen). Il en fera un peuple nombreux et fort et régnera sur lui sans fin a Sion. Jérusalem qui à cause de l’image des brebis est ici nommée « tour des troupeaux », c’est-à-dire endroit où les brebis seront en sécurité, retrouvera ainsi de nouveau la royauté de jadis, iv, 6-8. Rétabli de cette façon, Israël deviendra vis-à-vis des peuples païens aussi nombreux que la rosée et les gouttes de pluie sur les plantes et aussi fort qu’un lion parmi les troupeaux, v, 7-9.

4. v, 10-14 ; iv, 1-4. — Ce sont deux tableaux de l’état religieux, moral et social de la Palestine et du monde entier au temps messianique : Jahvé ôtera du pays toutes les idoles et tous les sortilèges, de sorte que le culte de Dieu sera pur et parfait. Il fera aussi disparaître toutes les forteresses, tous les chars et tous les chevaux où les Israélites mettaient si souvent leur confiance : Jahvé sera leur unique soutien, v, 10-14.

La paix et la vraie religion régneront alors non seulement en Israël, mais chez tous les peuples. Pour décrire cet état admirable de l’humanité, Michée reprend, iv, 1-4, l’oracle d’Isaïe, ii, 2-4, sur le pèlerinage des peuples à Sion et le complète surtout par la phrase classique : « on sera assis, chacun sous sa vigne et sous son figuier, et nul ne causera de terreur », iv, 4.

Les commentaires des douze petits prophètes, voir col. 1429.- — -Les commentaires de Michée seul de Cheyne, 1882 ; Beck, 1898 ; P. Haupt, 1911 ; J. M. P. Smith, 1912 ; Guthe, 1923. — E. Arnaud, Étude sur le prophète Michée, 1882 ; W. E.Barnes, A messianic prophecy (Micah, 4, 8-5, 6), dans The Expositor, 1904, p. 376 sq. ; Micah the prophel, dans The Interpréter, 1909, p. 353 sq. ; M. Ehrenhaus, Dos Messiasbild desMicha, 1909 ; H. Donat, Mi., 2, 6-9, dans Biblische Zeitschrift, 1911, p. 350 sq. ; Delporte, Michée, 1, 5 et 7 dans Biblische Zeitschrift, 1913, p. 235 sq. ; Michée, 1, 6, ibidem, 1914, p. 142 sq. ; Prolin, La vierge-mère chez Michée, dans Revue auguslinienne, 1910, p. 589 sq. ; Budde, Dos Ràtsel von Micha, 1, dans Zeitschr fur. die A. T. Wissenschaft, 1917, Micha, 2 und 3, ibidem, 1919-1920 ; A. Bruno, Der Herscher aus der Vorzeit, 1923 ; voir aussi ci-dessous l’art. Michée.

vi. nahum et HABACUC. — D’après la plupart des critiques modernes, les deux petits livres de Nahum et d’Habacuc auraient un contenu presque entièrement eschatologique, et seraient donc très importants pour le messianisme.

Nahum aurait annoncé la destruction de Ninive, parce qu’il nourrissait l’espoir que la disparition de la capitale assyrienne inaugurerait le bonheur et le salut définitif d’Israël. Mais rien ne justifie cette interprétation des oracles du prophète ; tout d’abord en effet, bien que le psaume par lequel son livre s’ouvre, c. i, soit une description de Jahvé venant pour le jugement, il est aussi peu eschatologique que le psaume xvii, dans lequel David en dessinant unethéophanie non moins grandiose glorifie Dieu uniquement pour le secours reçu de lui. Ensuite la promesse, ii, 3, que Jahvé restaurera la vigne — il faut lire gefen pour geon — - de Jacob, que les dévastateurs avaient ravagée, n’a aucune portée messianique. Nahum y annonce simplement que, le plus grand oppresseur de Juda disparu, son peuple se rétablira. La meilleure preuve qu’il n’envisage pas l’avènement de l’ère messianique est le fait que le cadre ordinaire dans lequel tous les prophètes préexiliens l’ont annoncé, savoir jugement sévère du gros du peuple et salut d’un petit reste, manque complètement chez lui. C’est donc à tort que W. Stærk, Das assyrische Weltreich im Urteil der Propheten, 1908, p. 179, reproche à Nahum un nationalisme étroit par suite duquel il prédirait à Juda le rétablissement définitif sans le faire dépendre

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