Aller au contenu

Page:Alfred de Vigny - Cinq-Mars, Lévy, 1863.djvu/486

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

« Après sa confession, il fut visité par le père Jean Terrasse, gardien du couvent de l’Observatoire de Saint-François de Tarascon, qui l’avoit visité et consolé durant sa prison de Tarascon. Il fut bien aise de le voir, il se promena avec lui quelque temps dans un entretien spirituel. Ce père estoit venu à l’occasion d’un vœu que M. de Thou avoit fait à Tarascon pour sa délivrance, qui estoit de fonder une chapelle de trois cents livres de rente annuelle dans l’église des pères Cordeliers de cette ville de Tarascon ; il donna ordre pour cette fondation, voulant s’acquitter de son vœu, puisque Dieu, disoit-il, le délivroit non-seulement d’une prison de pierre, mais encore de la prison de son corps ; demanda de l’encre et du papier, et écrivit judicieusement cette belle inscription qu’il voulut estre mise en cette chapelle :

Christo liberatori,
votum in carcere pro libertate
conceptum


Fran. August. Thuanus
e carcere vitæ jam jam
liberandus mérita solvit
.


XII Septembr. M. D. C. XLII
confitebor tibi, Domine, quoniam
exaudisti me, et factus es mihi
in salutem
.


« Cette inscription fera admirer la présence et la netteté de son esprit, et fera avouer à ceux qui la considéreront que l’appréhension de la mort n’avoit pas eu le pouvoir de lui causer aucun trouble. Il pria M. Thomé de faire compliment de sa part à M. le Cardinal de Lyon, et lui témoigna que s’il eust plu à Dieu de le sortir de ce péril, il avoit dessein de quitter le monde et de se donner entièrement au service de Dieu.

« Il écrivit deux lettres qui furent portées ouvertes à M. le Chancelier, et puis remises entre les mains de son confesseur pour les faire tenir ; ces lettres étant fermées, il dit : Voilà la dernière pensée que je veux avoir pour le monde, partons au paradis. Et dès