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LES AVENTURIERS DE LA MER


on l’entoura. La bouée de sauvetage qui lui avait permis de surnager était attachée à son poignet par une corde qu’il fallut couper. D’après les quelques paroles prononcées par le second, il paraîtrait qu’il était de quart au moment de la catastrophe et que, voyant son navire abordé, il prit à la hâte une bouée de sauvetage, en enroulant la corde autour de son poignet, et s’était jeté à la mer. Quant aux hommes de quart, on ignore où ils se trouvaient. On ignora également la cause du silence inexplicable qui précéda et suivit la catastrophe. En tout vingt-sept victimes.

On remarquera que les collisions sont d’une fréquence extrême dans la Manche. Il est vrai que nous en négligeons en d’autres lieux, telles que l’abordage, près de Yokohama, du vaisseau américain l’Onéida, par le vapeur le Bombay, qui ne fit pas moins de cent quinze victimes (24 janvier 1870), etc. Mais il est certain que les bateaux à vapeur qui vont d’Europe en Amérique, et réciproquement, suivent un chemin tracé sur l’Océan, — la voie la plus directe — et que ce chemin se rétrécit encore dans la Manche. Un défaut de vigilance ; une imprudence, une négligence même, une infraction quelconque aux règlements maritimes internationaux, si minutieux, si précis, et sur cette grande route maritime fréquentée par les steamers des deux mondes, un irréparable malheur arrive.

Nous avons sous les yeux les tableaux annuels des sinistres. Sur 1 000 ou 1 200 naufrages, 100 environ ont lieu par collision ; c’est beaucoup trop ! Cent navires perdus ! Et ce chiffre pourrait être augmenté encore d’une partie des sinistres rangés dans la liste des navires supposés perdus par défaut de nouvelles. Quant aux avaries par le fait d’abordages, elles dépassent le nombre de mille : La tempête est inévitable, le plus souvent, — et encore voit-on poindre le moment où, mieux-instruits des causes des grandes perturbations atmosphériques, les marins parviendront à se soustraire à leurs plus rudes assauts. Mais les risques et périls de mer par collision devraient être réduits à « l’inévitable » fatalement.

Ne pourrait-on pas appliquer à la navigation certains progrès modernes, et se servir pendant la nuit de l’éclairage électrique pour mettre tout navire en pleine lumière ? projeter des faisceaux lumineux sur l’océan et éclairer sa marche ? On y viendra, c’est dans la force des choses. Nous appelons de tous nos vœux une innovation qui sauvegarderait bien des existences et amoindrirait les pertes matérielles.