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Page:Améro - Les aventuriers de la mer.pdf/182

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LES AVENTURIERS DE LA MER


dans une seconde chaloupe. Ils sont capelés à leur tour ; mais plus heureux, ils reparaissent au sommet des vagues, atteignent enfin le navire en perdition et sauvent tous les naufragés.

« Cependant de nombreux canots se portaient au secours des maîtres pilotes ; la plus admirable émulation anime les marins ; au risque de nouvelles catastrophes, ils se précipitent et se pressent sur le lieu du désastre ; mais hélas ! les deux doyens du sauvetage ni le brave Celle ne purent être recueillis. Les corps de ces trois victimes du dévouement ne furent retrouvés qu’après le lever du soleil.

« Il y eut, ce jour-là, un grand deuil à Dunkerque.

« On essayait vainement de compter les navires arrachés au naufrage par ceux qu’on pleurait, navires de tous rangs, de tout tonnage, de toute nation.

« On disait comment, en 1822, Neuts avait sauvé neuf personnes de la même famille montant un bateau de pêche anglais. On rappelait son état d’épuisement, quand, le 4 février 1825, après le sauvetage de l’équipage entier du Thomas-Éléonore, il en revint blessé et tellement exténué qu’on dut le hisser évanoui, sur cette même estacade d’où on l’avait vu partir pour la plus belle des morts. On racontait son désintéressement, lorsqu’en 1846 il sauva de la famine l’équipage de la Léontine, qui avait perdu sa route, et l’on ajoutait qu’afin de conserver l’honneur complet de ce sauvetage nouveau pour lui, Neuts se refusa constamment à recevoir aucune indemnité. Les marins faisaient ressortir son habileté de pratique, par le récit de son pilotage du Norman, qu’en 1851 il mit en bon abri, malgré les brouillards, les courants et la tempête. Le feu, les écueils, les estacades, les dunes, les flots disparaissaient enveloppés par une brume opaque ; seul, Gaspard Neuts ne désespéra point du navire égaré dans le plus périlleux des labyrinthes ; il triompha. On citait, en outre, les hommes qu’au péril de la vie il avait sauvés en se jetant à la nage. On faisait remarquer, enfin, qu’il avait eu l’honneur d’être choisi, entre tous, comme patron du canot de sauvetage de la Société humaine de Dunkerque.

« À cette nomenclature incomplète des exploits de Gaspard Neuts, on répondait par celle des innombrables traits de courage de Bommelaer. En 1833, le 1er septembre, il sauve deux équipages entiers, l’un anglais, l’autre français. En octobre 1834, le bâtiment russe le Navarino est en perdition à l’entrée des estacades ; Bommelaer, par trois fois, se rend à bord et sauve successivement tous les gens en péril. Il avait été l’un