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LES AVENTURIERS DE LA MER


de Manille à Boston. Parmi les hommes de son équipage se trouvaient les deux Malais, excellents matelots, très appréciés de tous. Le 2 janvier, on était à environ 700 milles au sud-est de Sainte-Hélène, faisant bonne route, par un temps favorable, quand à minuit, les deux Malais, qui ne s’étaient pas quittés de la soirée, tombèrent à coups de couteau sur les deux officiers chefs de quart, au moment où ceux-ci se rendaient le service ; tuèrent l’un d’eux, et blessèrent l’autre à mort.

Celui-ci eut néanmoins la force de se jeter dans l’escalier conduisant à la chambre du capitaine Clarke, et de l’appeler. Le capitaine, qui s’était couché à dix heures, crut qu’on le réveillait pour affaire de service, mais à peine eut-il atteint le dernier échelon de l’escalier montant de sa cabine au pont, qu’il reçut à son tour un formidable coup de couteau dans le côté et un autre en plein visage. Malgré ses terribles blessures, il eut l’énergie de faire tête à l’assaillant ; mais le Malais continuant à le frapper avec son arme, le capitaine tomba baignant dans son sang à la porte de sa cabine, et les assassins le croyant mort, remontèrent sur le pont.

Mme Clarke s’était éveillée ; sans perdre un instant, sans une défaillance, elle pansa les blessures de son mari, qui avait pu s’armer d’un revolver. Un matelot l’avait rejoint ; mais celui-là mourait de peur : il avait vu tuer les deux officiers et demeurait terrifié.

À peine les blessures du capitaine étaient-elles pansées que les Malais revinrent vers sa cabine et tentèrent de s’y introduire en passant par une des fenêtres. Le capitaine tira au hasard deux coups de revolver qui décidèrent les assassins à battre en retraite.

L’homme préposé à la barre du gouvernail avait assisté à la scène de carnage sans oser faire un mouvement. Les Malais ne le ménagèrent pas plus que les autres ; d’un coup de couteau ils l’étendirent mort et le jetèrent par-dessus le bord, — comme ils avaient fait des deux officiers. Une demi-heure plus tard, ce fut le tour d’un autre matelot et du charpentier. Le cuisinier, un Chinois, trouva grâce devant eux.

Ce n’était pas fini. Les Malais cherchèrent alors à pénétrer dans la partie réservée au logement de l’équipage ; là, ils rencontrèrent de la résistance ; néanmoins, armés de leurs couteaux plantés dans de longs manches en bois, ils parvinrent encore à blesser quatre hommes.

Le jour se leva sur ces tristes scènes ; le capitaine, dans un état d’extrême faiblesse, était incapable de faire un mouvement ; les Malais se barricadaient sur le pont en prévision d’un retour agressif ; les survi-