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LES AVENTURIERS DE LA MER


prise dans les glaces le 9 septembre. Il fallut hiverner. On ébaucha une maisonnette avec la provision de charbon de terre ; la pêche, la chasse fournissaient du poisson et de la viande d’ours.

Cependant la Hansa, de plus en plus serrée dans les glaçons, fut écrasée et engloutie le 22 octobre. Les glaçons dérivaient vers le nord, emportant avec eux les naufragés dont la situation était des plus horribles. Qu’on se représente ce groupe d’hommes vivant dans la nuit constante de l’hiver polaire par 40 degrés de froid, sans aucune certitude du lendemain.

Le 1er janvier, une tempête commença. Elle dura quinze jours et, dans son dernier effort, elle brisa le glaçon et démolit la maison de charbon. Sur le plus gros débris de leur étrange radeau, les naufragés élevèrent une maisonnette nouvelle ; une chaloupe leur restait : elle pouvait servir à la dernière extrémité, si le glaçon emporté par le courant dans le mouvement tournant des eaux, heurté, pressé sans cesse par des icebergs, finissait par être pulvérisé ou englouti.

Avril arrive et s’écoule sans amener d’autre changement qu’un adoucissement de température ; au commencement de mai, la pluie tombe abondante, la glace fond et la chaloupe flotte. Il y avait six mois et dix-sept jours que la Hansa avait été détruite. Les naufragés abordèrent à la côte du Groenland, où les Esquimaux leur firent un bon accueil. Un brick danois les déposa à Copenhague, d’où ils regagnèrent l’Allemagne. Le roi Guillaume fit donner aux officiers et aux marins de la Hansa une double paie.

Coup sur coup, pour ainsi dire, se reproduisit un fait presque identique. L’année suivante, le Polaris, steamer à hélice américain, avait atteint le 80e degré, non plus à l’est du Groenland, mais à l’ouest, lorsqu’il se trouva pris dans les glaces et se mit à dériver ; délivré fortuitement, il fut repris au 77e degré et dériva encore au sud.

Le 15 octobre, au milieu d’une violente tempête, la glace s’ébranle et entraîne le navire. Soudain le mécanicien vient annoncer sur le pont que le navire a une voie d’eau que les pompes ne parviendront pas à épuiser. Sans vérifier l’exactitude de cette nouvelle alarmante, le capitaine Buddington, qui avait, remplacé le capitaine Hall, mort l’année d’avant, commanda aussitôt de jeter sur la glace tout ce qui pouvait être utilisé.

Cet ordre s’exécuta dans une confusion extrême, au milieu d’une profonde obscurité. En peu de temps tout fut sur la glace, baleinière, bateaux, kayaks des Esquimaux, armes, vivres, hommes — et chiens.