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Page:Amaury-Duval - L’Atelier d’Ingres.djvu/105

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L’ATELIER D’INGRES

quelle je ne fais pas son procès, remarquez-le bien, que le gouvernement s’occupe de faire des peintres et des musiciens. Mais vingt suffiraient pour les besoins vrais de la population de la France !

« Cependant l’idée de supprimer l’École des Beaux-Arts ne manquerait pas de faire jeter les hauts cris à bien des gens qui certes n’ont pas réfléchi que c’est pour la chose la plus inutile, la plus complétement de luxe, que l’État se donne tant de mal, et fait de si gros sacrifices.

« L’État n’a rien à voir dans ces questions-là. S’il a la prétention de conserver les bonnes traditions, il se rend ridicule, parce qu’il n’y a pas de traditions ; il y a des hommes de génie qui imposent au public leur façon de voir et de sentir. David renverse les traditions de ses prédécesseurs ; M. Ingres renverse celles de David.

« Et puis, quelles sont les traditions qu’on enseigne en ce moment à l’École ? Quel dessin ? Est-ce celui de Michel-Ange, qui ne ressemble pas au dessin de Raphaël ? ou bien le dessin de David, qui n’a aucun rapport avec celui de M. Ingres ? Quelle couleur ? Est-ce celle de Paul Véronèse, du Titien, ou bien celle de Rubens ?

« On n’apprend pas plus à être un grand dessinateur ou un grand coloriste qu’à être un grand poëte. Pour le métier de peintre comme pour