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Page:Amaury-Duval - L’Atelier d’Ingres.djvu/213

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L’ATELIER D’INGRES.

regrets dans le cœur de ceux qui n’ont pu jouir de cette vie calme et heureuse de la province, sans ses inconvénients, c’est-à-dire avec la liberté d’allures que l’on ne peut guère trouver que dans les grandes villes. Ainsi nous pouvions faire, sans la moindre gêne, deux parts bien distinctes dans notre existence : le travail pendant la journée ; le soir, si le cœur nous en disait, spectacle ou bal.

Un peu vêtus avec le sans-façon des artistes, nous visitions les églises et les musées, et personne ne semblait faire attention au peu d’élégance de notre costume. Le soir, nous endossions l’habit noir, et, cravatés de blanc, nous allions à la Pergola entendre la Ungher et faire nos visites dans les loges. Souvent, avant l’heure du dîner, nous allions voir aux Cascines le monde élégant qui s’y donnait rendez-vous vers la fin du jour, ou, si nous préférions l’isolement, nous avions pour but de promenade la plus ravissante campagne du côté de San-Miniato ou de Poggio-Imperiale.

Le prince qui gouvernait ce charmant pays était des meilleurs et des plus simples. On le rencontrait presque chaque jour se promenant dans les rues ou aux Cascines, bras dessus bras dessous avec la grande-duchesse, et ils étaient tous deux l’objet d’une politesse respectueuse, sans aucun mélange de curiosité gênante.