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Page:Amiel - Grains de mil, 1854.djvu/77

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La vie aussi toujours plus nous sépare ;
Vers l’horizon mènent mille chemins :
Chacun va, vient, revient, cherche et s’égare ;
Où pourrons-nous nous revoir, pèlerins ?
Dans les forêts il est une prairie ;
Tous les sentiers s’y rendent comme au port ;
Grütli boisé, ce lieu c’est la patrie :
Allons-y tous, notre cœur bat encor.

Patrie, ô mère auguste et vénérée,
Dans tes enfants l’amour n’a point failli ;
Quand ton appel retentit, voix sacrée,
À cet accent, mère, ils ont tressailli.
Et, sur ton sol comme au lointain rivage,
Humble ou puissant, dans la gêne ou dans l’or,
Jeune ou blanchi par les neiges de l’âge,
Du Genevois le cœur palpite encor.

Du Temps, amis, chaque battement d’ailes,
Efface, efface et nos mœurs et nos traits ;
Ô souvenir, sans les âmes fidèles,
Toi-même, hélas ! aussi disparaîtrais.
Ah ! serrons-nous autour des vieilles fêtes,
Sous leur drapeau, du temps bravons l’effort :
Que des aïeux, pour sauver les conquêtes,
Du Genevois le cœur palpite encor !